<159>secrétaire, que malheureusement madame du Châtelet m'avait donné elle-même, avait pris la peine de transcrire, à Bruxelles, plusieurs de mes lettres et de celles de madame du Châtelet, plusieurs même de V. M., et les avait mises en dépôt chez une marchande de Bruxelles, nommée Desvignes, qui demeure à l'enseigne du Ruban-bleu. Cette femme en avait vendu une partie aux Ledet, qui les ont imprimées dans leur sixième volume; et elle était en marché du reste, lorsque le Roi mon maître prit Bruxelles. Nous nous adressâmes sur-le-champ à M. de Séchelles,a nommé intendant des pays conquis. Il fit une descente chez la Desvignes, se saisit des papiers, et les renvoya à madame la marquise du Châtelet.

Au reste, Sire, madame du Châtelet et moi, nous sommes toujours pénétrés de la même vénération pour V. M., et elle vous donne sans difficulté la préférence sur toutes les monades de Leibniz. Tout sert à la faire souvenir de vous : votre portrait, qui est dans sa chambre, à la droite de Louis XIV; vos médailles, qui sont entre celles de Newton et de Marlborough; votre couvert, avec lequel elle mange souvent; enfin, votre réputation, qui est présente partout et à tous les moments.

Pour moi, Sire, je n'ai d'autre regret dans ce monde que celui de ne plus voir le grand homme qui en est l'ornement. J'achève paisiblement ma carrière, et je la finirai en vous protestant que j'aurai toujours vécu avec le plus véritable attachement et le plus profond respect, etc.

221. A VOLTAIRE.

Berlin, 18 décembre 1746.

Le marquis de Paulmib sera reçu comme le fils d'un ministre français que j'estime, et comme un nourrisson du Parnasse accré-


a Voyez t. XIX, p. 44, et t. XX, p. 58 et suivantes.

b Voyez t. XI, p. 137, et t. XIX, p. 16.