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11. AU PRINCE HENRI.

(1746.)



Mon cher frère,

Nous n'avons nul reproche à nous faire, nous avons la même froideur les uns envers les autres; et puisque vous le voulez ainsi, j'en suis content. Il n'y a que mon entremise pour vos amours qui vous adoucisse quelquefois envers moi, lorsque vous en avez besoin. D'ailleurs, le peu d'amitié que vous me témoignez dans toutes les occasions ne m'excite pas à faire de nouveaux efforts de tendresse en faveur d'un frère qui a si peu de retour pour moi. Voilà tout ce que j'ai à vous dire pour cette fois, vous assurant que je suis, mon cher frère, etc.

12. AU MÊME.

(1746.)



Mon cher frère,

Votre plume éloquente vous dit des choses merveilleuses. Apparemment vous y entendez finesse; pour moi, j'avoue franchement ma bêtise, mais je n'y comprends rien. Il faut, si vous m'aimez, que votre amitié soit métaphysique, car je n'ai jamais vu aimer les gens de la sorte, sans les regarder, sans leur parler, sans leur donner le moindre signe d'affection. Heureux sont les gens que vous aimez, je veux le croire. Si vous me mettez de ce nombre, je puis vous assurer que je vis dans une ignorance profonde des sentiments que vous avez pour moi. Je ne connais que votre éloignement, votre tiédeur, et la plus parfaite indifférence qui fût jamais.

Je suis, monsieur mon frère, etc.