<405>lettres de chancellerie de l'Impératrice, mais aucune de main propre, quoique autrefois elle eût coutume de m'écrire elle-même. Moi qui n'entends rien aux cérémonies, je ne sais s'il faut y chercher finesse ou non. Jamais tant de testaments, de conventions, de traités, de constitutions de l'Empire ne m'ont passé par les mains comme maintenant. Je crains de devenir un petit Cujas, un Pufendorf, un animal empesé de la rouille de Ratisbonne. Mais il faut être, dans ce monde, caméléon et réfléchir les couleurs des conjonctures. Du reste, je suis dans la plus grande tranquillité pour l'avenir, résolu de faire mon devoir, soit comme scribe, soit comme militaire, et abandonnant l'avenir aux vagues destinées. Je vous embrasse, etc.

290. AU MÊME.

Le 16 février 1778.



Mon très-cher frère,

J'ai reçu votre lettre, mon très-cher frère, avec bien du plaisir, et je puis vous annoncer que mes lettres de France sont presque aussi bonnes que celles de Russie. Ils semblent déjà se déterminer à des déclarations soutenues d'armes; ils n'attendent qu'une déclaration de la cour de Vienne pour prendre un parti plus décidé. Nous aurons donc la France et la Russie. Il ne s'agit point, mon cher frère, dans l'affaire présente, d'acquisitions ou d'agrandissement, mais de réprimer une bonne fois l'ambition autrichienne, pour que son autorité ne devienne pas despotique dans l'Empire, ce qui serait à notre plus grand détriment. Ainsi, quelques propositions d'acquisitions qu'ils me fassent, je les rejetterai toutes également, très-résolu de ne remettre l'épée au fourreau que lorsqu'ils auront restitué toutes leurs usurpations. Pour la Saxe, elle ne doit pas vous causer d'embarras; appuyés comme nous le serons par la France et par la Russie, ces gens se joindront sûrement à nous pour coopérer à leurs propres intérêts.