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4. AU MÊME.

Ohlau, 17 avril 1741.



Mon très-cher frère,

Ce me sera une véritable consolation que de vous revoir; je me flatte d'avoir demain ce plaisir.

Nous avons battu l'ennemi; mais tout le monde pleure, l'un son frère, l'autre son ami; enfin nous sommes les vainqueurs les plus affligés que vous puissiez vous figurer. Dieu nous préserve d'une affaire aussi sanglante et meurtrière que celle de Mollwitz! Le cœur me saigne lorsque j'y pense.

Adieu, cher frère; aimez-moi toujours, et soyez persuadé de la tendresse infinie avec laquelle je suis, etc.

5. AU MÊME.

Potsdam, 24 février 1744.



Mon très-cher frère,

Le prince Charlesa m'a rendu votre lettre, qui m'a fait bien du plaisir, vous sachant en bonne santé et content. Je suis bien aise que vous vouliez suivre mon conseil, et penser un peu à des choses sérieuses qui tôt ou tard doivent faire votre métier. Je n'ai point d'enfants, je puis mourir, et je vous regarde comme mon héritier. Il vous conviendrait mal de vous mêler d'intrigues et de faire des cabales dans l'État; mais il vous convient de vous instruire de tout pour vous faire de justes idées d'un gouvernement où le destin vous appelle avec le temps. Ce serait même honteux, à votre âge, si vous n'aviez pas les informations de ce qui se passe dans votre patrie; et le militaire ne saurait subsister ni se maintenir solidement sans la bonne administration des


a Voyez t. III, p. 63.