<290>de se suivre, et en qualité d'hommes qui sont nés pour le bonheur et pour le malheur, il faut se préparer à recevoir avec un visage égal telle liqueur que Jupiter voudra répandre sur nous de ses deux urnes. Enfin, ma chère sœur, c'est se faire tort à soi-même que de ne prévoir que des malheurs; nos fortunes sont mêlées, nous en avons plus de bonnes que de mauvaises à attendre. Je vous embrasse mille fois, en vous assurant de la parfaite tendresse et de tous les sentiments avec lesquels je suis à jamais, ma chère sœur, etc.

316. A LA MÊME.

(Potsdam) ce 23 (août 1756).



Ma très-chère sœur,

J'ai reçu votre lettre avec bien du plaisir, puisqu'elle est une marque du rétablissement de votre santé. Je suis bien fâché, ma chère sœur, que vous ne soyez pas contente de la nouvelle Jérusalem. Je crois que le séjour d'Erlangen, tant pour l'air que pour l'agrément, vous conviendra mieux que celui de Baireuth.a J'attends ici la réponse de la reine de Hongrie, qui va décider de la paix ou de la guerre; je voudrais l'avoir déjà reçue, pour savoir à quoi m'en tenir, n'y ayant rien de plus inquiétant dans le monde que l'incertitude. Daignez me conserver votre précieuse amitié, et soyez persuadée de la parfaite tendresse avec laquelle je suis, ma très-chère sœur, etc.


a La Margrave avait écrit à son frère, le 14 août : « Nous nous préparons pour aller dans trois semaines au Kaiserhammer, et nous irons passer l'hiver à Erlangen. Toutes les fatalités nous arrivent avec les bâtiments; le château a été brûlé, et celui-ci tombe. Il est si misérablement construit, qu'on tremble d'y brûler, et les murs sont si minces, qu'on ne peut y durer pendant l'hiver. »