<148>

CHAPITRE XXV.

La question sur la liberté de l'homme est un de ces problèmes qui pousse la raison des philosophes à bout, et qui a souvent tiré des anathèmes de la bouche des théologiens. Les partisans de la liberté disent que si les hommes ne sont pas libres, Dieu agit en eux; que c'est Dieu qui, par leur ministère, commet les meurtres, les vols et tous les crimes; ce qui est manifestement opposé à sa sainteté. En second lieu, que si l'Être suprême est le père des vices et l'auteur des iniquités qui se commettent, on ne pourra plus punir les coupables, et il n'y aura ni crimes ni vertus dans le monde. Or, comme on ne saurait penser à ce dogme affreux sans en apercevoir toutes les contradictions, on ne saurait prendre de meilleur parti qu'en se déclarant pour la liberté de l'homme.

Les partisans de la nécessité absolue disent, au contraire, que Dieu serait pire qu'un ouvrier aveugle et qui travaille dans l'obscurité, si, après avoir créé ce monde, il eût ignoré ce qui devait s'y faire. Un horloger, disent-ils, connaît l'action de la moindre roue d'une montre, puisqu'il sait le mouvement qu'il lui a imprimé, et à quelle destination il l'a faite; et Dieu, cet être infiniment sage, serait le spectateur curieux et impuissant des actions des hommes! Comment ce même Dieu, dont les ouvrages portent tous un caractère d'ordre, et qui sont tous asservis à de certaines lois immuables et constantes, aurait-il laissé jouir l'homme seul de l'indépendance et de la liberté? Ce ne serait plus la Providence qui gouvernerait le monde, mais le caprice des hommes. Puis