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7747. AU CONSEILLER PRIVÉ DE GUERRE DE KLINGGRÆFFEN A VIENNE.

Potsdam, 24 juillet 1756.

Le rapport que vous m'avez fait du 14 de ce mois, m'a été bien rendu.

Secret et Soli, que vous déchiffrerez vous-même :

Quant aux arrangements militaires qui se font là-bas, je veux bien vous dire, quoiqu'absolument pour votre direction seule, qu'à la fin le bonheur a fait que j'en ai démêlé tout le mystère, en ce que j'ai appris de très bonne main et de lieu très sûr1 que, pendant la négociation sur le traité [des cours] de Vienne et Versailles, la première a insisté formellement que la France s'engageât de ne point donner de secours ni à moi ni à la Porte Ottomane, et que la cour de France s'y était prêtée, quoiqu'avec beaucoup de peine. Que la raison pourquoi la cour où vous êtes avait demandé absolument ce point, était qu'il y avait un plan arrêté entre les deux cours impériales de m'attaquer à la fois, la cour de Vienne avec 80,000 et celle de Russie avec 150,000 hommes [tant] en troupes régulières qu'irrégulières; qu'on l'aurait exécuté dès cette année-ci, mais qu'on se voyait obligé de le renvoyer au printemps prochain, puisque l'armée russienne n'était pas encore assez en force pour une telle entreprise et qu'elle voudrait y suppléer par un grand nombre de recrues qu'elle assemblerait l'hiver prochain dans les provinces intérieures du pays, la recrue de l'hiver passé de 70,000 hommes s'étant débandée plus de la moitié sur la route, et qu'un bon quart du reste était crevé de maladie, avant que de parvenir à sa destination, de sorte qu'il en manquait beaucoup à chaque régiment, et que, de plus, la cour de Vienne avait de son côté aussi à régler bien des détails encore pendant l'hiver, avant d'avoir ajusté le tout au point de pouvoir mettre son vaste projet en exécution.

Voilà le dénouement de toute l'affaire, de sorte que je crois bien que, pourvu que cette cour ne change de façon de penser et qu'il dépende d'elle, elle voudrait surseoir ses entreprises jusqu'au printemps de l'année qui vient, malgré les démonstrations guerrières qu'elle fait. Car au moins j'espère que vous serez informé à présent qu'elle s'est déterminée à faire assembler un corps de troupes de 18 régiments près de Holleschau derrière Olmütz.2

Je suis bien fâché que c'est moi qui vous prévienne sur ceci, mais n'y a-t-il pas de votre faute en ce que vous n'avez pris garde à ce que je vous avais ordonné de bouche et par écrit, de vous acquérir une bonne connaissance dans les bureaux, qui n'aurait pas manqué de nous avertir de tout ce qui arrive:3



1 Bericht Hellen's, Haag 16. Juli, nach einem Schreiben Swart's an Fagel, d. d. Petersburg 19. Juni. Vergl. Nr. 7749. Vergl. auch S. 95.

2 Vergl. S. 110.

3 Vergl. Bd. XII, 512.