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d'un coup l'exécution du projet qu'on a formé, et dont il a été fait mention cidessus. A quoi, on a ajouté qu'en attendant qu'on prît des arrangements définitifs à cet égard, il serait nécessaire qu'on se concertât, pour priver Votre Majesté de toutes les ressources qu'Elle saurait trouver pour l'exécution des desseins qu'Elle pourrait avoir formés en faveur de l'Angleterre. C'est en conséquence de ces insinuations qu'on a entamé avec la Russie la négociation dont est chargé le sieur Douglas,1 et qu'on s'est considérablement réchauffé envers la Bavière,2 qu'on enlèvera certainement à l'Angleterre, si la dernière ne met promptement les fers au feu. Je sais, d'ailleurs, de fort bon lieu que la cour de Vienne ne s'en tient pas aux représentations dont je viens de rendre compte; mais qu'afin de parvenir d'autant plus promptement à ses fins et de presser la conclusion du traité qu'elle propose, elle répand ici avec affectation que Votre Majesté fait marcher un nombre considérable de troupes en Silésie, et qu'Elle leur fait faire des mouvements très suspects du côté de la Bohême. Le ministère de France est tellement imbu de ce soupçon et en est si vivement alarmé qu'il en a témoigné la plus grande inquiétude à différentes personnes de ma connaissance et qu'il les a chargées de me sonder indirectement sur ce qui pourrait en être … Je crois aussi ne pas devoir laisser ignorer à Votre Majesté, a cette occasion, que je m'aperçois par moi-même, et que différents membres du conseil ont aussi fait entendre à plusieurs personnes de mes amis, que les menaces qu'Elle avait fait faire à la Suède,3 et la conduite qu'Elle observait envers le duc de Mecklembourg,4 prouvaient bien que Ses intentions n'étaient nullement pacifiques et qu'Elle ne cherchait qu'à troubler la paix de l'Europe. D'un autre côté, il m'a été assuré de fort bon lieu que la Saxe a fait témoigner par son ministre5 qu'elle était extrêmement iquiète de différents mouvements de troupes que Votre Majesté faisait du côté de ses frontières … J'ai tout lieu de

contre moi; que, si la cour de Vienne faisait du bruit pour quatre régiments d'infanterie que j'avais fait marcher en Poméranie,6 et de ce que j'avais mis mes forteresses de Silésie hors d'insulte,7 elle découvrait bien la mauvaise volonté qu'elle avait contre moi, tandis que je n'ai rien dit des grands amas d'artillerie qu'elle fait sur mes frontières, et des prodigieuses levées dont elle augmente ses troupes et les renforce en Bohême et en Moravie. Vous donnerez copie au sieur Rouillé des ordres ci-joints, qui ont été donnés au sieur Klinggræffen à Vienne,8 pour demander des éclaircissements à l'Impératrice sur ce qui me fait soupçonner ses intentions. Ce qui se passera ultérieurement dans cette négociation, vous sera fidèlement communiqué, pour être par vous remis au sieur Rouillé. Les Français qui n'ont pas les yeux fascinés, verront par la suite de cette négociation que, si les intentions de l'Impératrice-Reine sont nettes, si ce traité dont on l'accuse avec tant de certitude,9 est faux, il ne tiendra qu'à elle de perpétuer la paix, mais si elle ne me donne pas les assurances que de droit j'exige d'elle, alors ce n'est plus celui qui attaque, qui est l'agresseur, mais bien celui qui a formé le projet de faire la guerre à l'autre.

Je regarde le ministère français trop faible et trop borné pour se garder des embûches de celui de Vienne, le comte Kaunitz les



1 Vergl. Bd. XII, 513.

2 Vergl. S. 62; Bd. XII, 480.

3 Vergl. Bd. XII, 293- 294.

4 Vergl. Bd. XII, 511.

5 Graf Vitzthum von Eckstädt.

6 Vergl. Bd. XII, 463.

7 Vergl. S. 16—23. 119.

8 Vergl. Nr. 7722.

9 Vergl. S. 122.