<200> alliés n'étaient menacés d'aucune attaque, mais bien les miens, que, pour ne lui rien dissimuler, on m'avait informé, d'une manière à n'en pas douter, qu'il y avait un concert pris entre elle et la cour de Pétersbourg de m'attaquer inopinément, celle de Russie avec 120,000 hommes et l'Impératrice-Reine avec une armée de 80,000 combattants;1 que ce projet, qui devait se mettre en exécution dès le mois de mai de cette année, avait été différé à cause que les troupes russes avaient manqué de recrues, leur flotte de matelots et la Livonie de blés pour les nourrir, et que les deux cours étaient convenues de ne remettre les choses que jusqu'au printemps qui vient. Et, comme il me revenait que l'Impératrice rassemblait ses forces principales en Bohême et en Moravie, que les troupes campaient à peu de distance dé mes frontières, qu'on faisait des amas considérables de munitions de guerre et de bouche, que l'on tirait des cordons de troupes irrégulières le long de mes frontières, comme si nous étions en pleine guerre, je me croyais en droit d'exiger de l'Impératrice une déclaration formelle et catégorique, consistant dans une assurance verbale ou par écrit qu'elle n'avait aucune intention de m'attaquer ni cette année-ci, ni l'année qui vient; soit que cette déclaration se fasse par écrit ou verbalement en présence des ministres de France et de l'Angleterre, que cela m'était égal et dépendait du bon plaisir de l'Impératrice; qu'il fallait savoir si nous sommes en guerre ou en paix, j'en rendais l'Impératrice l'arbitre; si ses intentions étaient pures, que c'était le moment de le mettre au jour, mais que, si on me donnait une réponse en style d'oracle, incertaine et non concluante, l'Impératrice n'aurait qu'à se reprocher les suites qu'attirerait la façon tacite dont elle me confirmerait les projets dangereux qu'on avait formés contre moi, et que j'attestais le Ciel que j'étais innocent des malheurs qui s'ensuivraient. Voilà toute la dépêche que j'ai faite à ce sujet à mon ministre à Vienne, dont aussi j'ai fait faire communication au marquis de Valory.2 C'est, à présent, la réponse de la Reine-Impératrice que j'attends, et qui décidera de la paix ou de la guerre.

Au surplus, j'appréhende fort que tout ceci ne plaise pas aux Français, après qu'ils se sont une fois livrés dans les mains des Autrichiens et pleins de prévention contre moi.

Au reste, on dit que le maréchal de Belle-Isle avait des intelligences secrètes en Angleterre.3 Comme ceci est un peu scabreux, je vous saurais un gré particulier si vous pouviez approfondir et vous mettre au fait en quoi ces intelligences consistent, et quel est proprement le plan d'opération du maréchal de Belle-Isle, si c'est encore le même que vous m'avez communiqué autrefois ou s'il y a eu du changement; en m'informant bien de tout ceci, vous me rendrez un service dont je vous tiendrai particulièrement compte.

Comme les bruits d'un corps de troupes que la France assemble du côté de la Meuse sous les ordres du prince de Conty, vont en



1 Vergl. S. 95. 105. 114. 151.

2 Vergl. S. 177.

3 Vergl. S. 192.