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Majesté;1 car je sais de quelqu'un qui s'est trouvé présent à l'entretien que ce dernier a eu avec l'abbé de Bernis immédiatement après la réception de son courrier, qu'il a répété à plusieurs reprises qu'il pourrait encore y avoir matière à négociation, si Votre Majesté voulait Se prêter à donner à l'Impératrice les mêmes assurances qu' Elle exigeait de cette Princesse … Le lendemain de l'arrivée du courrier du comte de Starhemberg, Madame la Dauphine en a reçu un du Roi son père, par lequel ce Prince lui a non seulement renouvelé dans les termes les plus lamentables les plaintes2 qu'il lui avait déjà portées de la dureté avec laquelle il prétend que Votre Majesté en agit à son égard, mais par lequel il lui mande en même temps qu'il venait d'être averti que Votre Majesté Se proposait de S'assurer de sa personne et de séquestrer ses troupes et ses Etats jusqu'à la conclusion de la paix. Cette nouvelle a considérablement augmenté la perplexité dans laquelle Madame la Dauphine se trouvait déjà depuis plusieurs jours, et l'a déterminée à faire de nouveaux efforts auprès de Sa Majesté Très Chrétienne, pour émouvoir sa compassion en faveur du Roi son père et la persuader à s'opposer à des desseins aussi funestes. L'on assure que le Roi a été extrêmement attendri de cette nouvelle démarche et vivement touché de l'état dans lequel se trouve Madame la Dauphine, et qu'il lui a réitéré dans les termes les plus forts qu'il ferait tout ce qu'il pourrait, pour réparer cet outrage et tirer le Roi son père de la triste situation où il se trouvait. Cet évènement a fait la même impression sur toute la famille royale, qui partage la douleur de Madame la Dauphine avec les témoignages de la plus grande sensibilité et s'intéresse vivement en sa faveur … Je ne saurais exprimer la révolution subite que la douleur de la famille royale a occasionnée dans l'esprit de tous les courtisans, même de toute la nation, et la rapidité avec laquelle elle a soulevé contre Votre Majesté même ceux qui paraissent être le plus favorablement disposés pour Elle, et auxquels la réunion des maisons de Bourban et d'Autriche

viendra plutôt militaire qu'elle ne roulera guère plus sur des négociations, et je ne comprend que trop combien la cour et le ministère de France, aveuglés par les Autrichiens et échauffés par les cris des Saxons, sont animés et révoltés contre moi. Ainsi, il ne vous restera que de tâcher d'approfondir de tous côtés et de m'informer si vous croyez que les Français entreprendront encore dans le courant de cette année-ci sur mon pays de Clèves ou non. Dans le premier cas, ma volonté expresse est que, dès que vous serez sûr qu'on tentera l'invasion dans le pays de Clèves, vous devez incessamment envoyer quelqu'un habillé en passager et point du tout dans votre livrée, mais sous le nom et l'apparence d'un voyageur, tout droit par le Brabant et les Pays-Bas à Wésel, afin d'avertir là au plus tôt possible et sans la moindre perte du temps le gouvernement du dessein que la France a pris. Ce que vous devez exécuter avec toute la promptitude et la ponctualité la plus exacte.

D'ailleurs, mon intention est que vous devez faire répandre peu à peu dans le public en France tous les arguments et les motifs que je vous ai suppédités par mes différentes dépêches antérieures,3 par rapport à la levée de boucliers que je me suis vu forcé de faire contre la Reine-Impératrice, et touchant ma démarche vis-à-vis de la cour de Dresde. Vous n'en excepterez pas même le précis des différentes dépêches du comte de



1 Vergl. auch Nr. 7930 S. 295.

2 Vergl. S. 424.

3 Vergl. Xr. 7928. 7936.