8831. AU CONSEILLER PRIVÉ DE LÉGATION DE HÆSELER A COPENHAGUE.

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Häseler berichtet, Kopenhagen 29. März: „Le grand-maréchal Moltke vient enfin de s'ouvrir pour la première fois des négociations de neutralité pour le pays d'Hanovre.477-1 Je lui ai fait part, par manière de discours, de la lettre de réquisition que la France a fait adresser au landgrave de Hesse-Cassel pour le libre passage d'une armée qui doit marcher vers les États de Votre Majesté et ceux d'Hanovre,477-2 et à cette occasion il m'a fait connaître qu'on ne saurait rien dire là-dessus, avant de savoir quel sera le succès des négociations de neutralité dont je saurais bien qu'il était question, en y ajoutant qu'on touchait au moment de la décision de ces affaires. Autant que j'ai compris par ses discours, les dernières propositions des cours de Vienne et de Versailles sont telles qu'on ne croit pas que le roi d'Angleterre s'y refusera. Il m'a fait entendre qu'il y avait eu un mésentendu dans les premières ouvertures; que la demande du passage par l'électoral d'Hanovre477-3 avait d'abord révolté le roi d'Angleterre, comme directement contraire à son alliance avec Votre Majesté; qu'à la vérité il n'en avait pas été fait mention dans le mémoire, et que le ministre de Vienne n'avait fait que l'insinuer de bouche, mais que toutefois cela avait, comme de raison, produit cet effet. Il m'a fait entendre qu'en tout ceci on s'employait de façon ici que Votre Majesté serait satisfaite, me faisant entrevoir qu'il est question d'empêcher la France d'agir. Il m'a paru fort content de la manière dont la cour de Versailles s'est prêtée à cette rencontre pour le bien de la paix, et extraordinairement flatté de la part qu'on pourra dire avoir eu au succès d'une négociation qui saurait sauver l'Allemagne, si bien qu'au cas qu'elle réussît,

Lockwitz, 8 avril 1757.

J'ai reçu la dépêche que vous m'avez faite du 29 de ce mois. Je suis en peine même pour la cour de Danemark de ce qu'elle se laisse tant amuser par les cours alliées de Vienne et de Versailles par une neutralité trompeuse qu'on offre pour l'Hanovre, uniquement dans le but d'arrêter par là toutes les mesures qu'on saurait prendre pour se mettre en bon état de défense, et pour désunir ceux dont les vrais intérêts sont de rester fermement unis et de faire tous leurs efforts pour rétablir la balance des pouvoirs en Europe. Mais ce qui m'étonne le plus, c'est que la cour où vous vous trouvez, se laisse aveugler en sorte qu'elle se flatte et s'imagine d'empêcher la France d'agir et de ne pas faire marcher un seul homme en Allemagne, ni même au sujet du contingent auxiliaire, en même temps que la France commence à commettre des hostilités dans mon pays de Clèves, qu'elle y fait entrer ses troupes, et qu'elle assemble une armée dans le pays de Cologne auprès de [Neuss],477-4 pour agir, dès que l'herbe sera venue.

C'est le même cas par rapport à la Russie, que la cour de Copenhague croit si faible de n'avoir

la France ne fera pas marcher un homme. Ce qu'il m'a fait entendre aussi au sujet du contingent auxiliaire;478-1 que, la France ne croyant pas de sa gloire d'agir comme partie auxiliaire, il y avait lieu de croire qu'elle se dispenserait bien également à le fournir.

Quant aux Russes, il s'en met aussi tous les jours moins en peine. ... Il compte principalement sur la grande faiblesse de la Russie, manquant absolument de tout,478-2 n'ayant pas même le moyen à présent de fournir le nécessaire aux troupes de terre et moins encore à quelque expédition maritime. . . .

En général, toute son attention ne paraît être fixée au moment présent qu'au succès de la négociation de neutralité, dont il espère d'apprendre incessamment des nouvelles positives. ... Le baron de Wedell a l'air d'un homme qui rit sous cape, ne s'ouvrant pas du tout; ce qui me fait toujours soupçonner, malgré ce que le grand-maréchal Moltke m'a fait entendre, qu'il y a encore quelque chose là-dessous qui ne s'accorde pas avec les intérêts de Votre Majesté. Ce qui me confirme dans ce sentiment, c'est que je ne vois d'ailleurs l'intérêt de la maison d'Autriche d'affectionner si fort cette négociation.

pas les moyens de fournir le nécessaire aux troupes de terre et moins encore à quelque expédition, tandis que celle-ci fait équiper actuellement sa flotte et la met en état de pouvoir sortir au premier beau temps, comme vous le verrez par une lettre de Pétersbourg du 22 de mars, qui m'a été communiquée de très bonne main, et que je fais insérer ici in extenso.

« Le général-maître d'équipages de la flotte Golyzin est retourné ici depuis trois jours de Kronstadt et a fait son rapport que toute la flotte était complète, équipée et prête à lever les voiles pour mettre en mer, dès que les eaux seraient déchargées de glaces, et qu'elle consistait, inclusivement avec l'escadre qui était à Reval, en 30 vaisseaux de guerre, frégates et galiotes à bombes. »478-3

Vous ne laisserez pas de communiquer tout ceci aux ministres danois, afin de voir s'il n'y a pas moyen de leur faire tomber le bandeau fatal devant les yeux qui les aveugle, et pour reconnaître ce que l'Hanovre, l'Angleterre et au bout du compte le Danemark même auront à attendre, dès que les deux cours alliées seront parvenues au point de faire subir aux autres puissances telle loi qu'elles voudront leur imposer.

Federic.

Nach dem Concept.



477-1 Vergl. S. 279. 434.

477-2 Vergl. S. 381. 3S8.

477-3 Vergl. S. 279.

477-4 Vergl. S. 472. 487.

478-1 Vergl. S. 453.

478-2 Vergl. S. 475.

478-3 Vergl. auch Nr. 8830.