9337. A LA MARGRAVE DE BAIREUTH A BAIREUTH.

Erfurt, 15 septembre 1757.

Ma très chère Sœur. Je dois vous rendre compte de mon expédition qui a été des plus singulières. Je n'ai vu depuis Dresde que des hussards autrichiens et des pandours, que nous avons constamment frottés,345-4 et qui ont eu l'opiniâtre constance de se laisser battre, autant que nous l'avons jugé à propos. Je suis hier venu ici; nous avons pris la ville, sans coup férir, et l'armée française et de l'Empire est pour nous un être de raison. Bien des personnes disent l'avoir vue; mais ne trouve-t-on pas des gens qui prétendent avoir eu des apparitions? Ainsi je douterais de l'existence de cette armée, si j'avais trouvé des chevaux dans ce pays; mais il n'y en a point : quelqu'un les doit avoir enlevés, et ce quelqu'un doit être cette armée invisible. On m'assure à présent que toute cette race est marchée sur Eisenach. Il faudra voir<346> s'ils y resteront. Enfin, ma chère sœur, les lauriers que nous gagnons à cette expédition, ne sont que du clinquant. Si je n'avais à faire qu'à ces ennemis ici et alarmés du fiscal, je vous en tiendrais bon compte; mais, mais, sur ce sujet les mais ne finiraient jamais.

Je vous supplie de vous tranquilliser à présent et de ne plus vous inquiéter; quoique les choses soient dans une épouvantable crise, nous approchons à grands pas de l'hiver, et celui-là mettra fin à toutes nos querelles, du moins pour la durée de sa rigueur.

Adieu, ma chère et adorable sœur, je vous supplie de me conserver votre précieuse amitié et d'être persuadée de la tendresse parfaite, avec laquelle je suis, ma très chère sœur, votre très fidèle frère et serviteur

Federic.

Nach der Ausfertigung. Eigenhändig.



345-4 Vergl. S. 337. 340.