10772. AU LIEUTENANT-GÉNÉRAL COMTE DE SCHMETTAU A DRESDE.

Breslau, 10 mars 1759.

Les deux lettres que vous m'avez faites du 6 de ce mois, m'ont été bien rendues, dont je vous sais gré pour toutes les nouvelles qu'elles comprennent. Mais pour ce qui regarde la marche d'un corps des troupes autrichiennes vers l'Italie,107-2 il faut que je vous dise que je n'envisage pas cette nouvelle comme tout-à-fait avérée, vu qu'on prétend savoir à présent que ces troupes ont reçu ordre de faire halte sur leur marche, qu'on n'est pas tout-à-fait hors d'espérance que le roi d'Espagne ne revienne de sa maladie, et que, pour amuser le roi de Deux-Siciles et différer les troubles jusqu'à un temps plus convenable à la cour de Vienne, on a entamé des négociations avec lui, dont on se flatte qu'elles l'amuseront au moins jusqu'à un autre temps où il sera plus aisé à ladite cour de lui donner la loi. Voilà, je crois, ce qui saura éloigner assez encore la marche des troupes en Italie, si ce qu'on débite là-dessus, est vrai et fondé.

J'ai été bien content de ce que vous me marquez des sentiments de la jeune cour.107-3 Quant au moyen qu'elle propose, que, pour l'assister l'on relâchât quelque somme de ce qui était convenu par la convention faite avec la chambre des finances,107-4 vous lui direz convenablement que par ce moyen on donnerait trop aux yeux des spéculatifs et des malintentionnés en Saxe qui, voulant en approfondir la raison, pénétreraient aisément le secret dont il est cependant absolument nécessaire qu'il reste impénétrable. Je crois donc qu'il sera mieux gardé, si, le cas existant, l'on se serve de l'entremise de ce médecin bavarois,107-5 avec lequel vous avez déjà eu une conversation secrète. Avec tout cela, il me paraît nécessaire que la jeune cour ne cesse jamais de crier vers la cour de Varsovie, pour lui fournir la subsistance, à quoi vous l'exciterez d'autant plus qu'il y va de mon intérêt; car autant que la jeune<108> cour arrache de celle de Varsovie de l'argent que celle-ci reçoit de la France, comme presque son unique ressource, autant on ôte à celle-là les moyens de nuire.

Voici la réponse que j'ai faite au prince de Liechtenstein, à qui je veux bien permettre, par une considération personnelle pour lui, qu'il retourne à Vienne contre son engagement et parole d'honneur.108-1 Pour tous les autres officiers prisonniers de guerre autrichiens, il faut absolument qu'ils restent dans la situation présente où ils se trouvent, et vous les observerez d'ailleurs d'assez près et les tiendrez courts, pour ne pouvoir faire du mal. Je suis fâché d'être obligé de procéder comme cela avec eux, mais la mauvaise foi de plusieurs de ceux que j'avais relâchés sur leur parole d'honneur, m'y oblige, parceque, quoiqu'ils ne soient pas effectivement rentrés parmi les régiments, ils ont cependant fait service pour exercer les recrues et pour entrer servir parmi les troupes en garnison.

Federic.

Nach dem Concept.



107-2 Vergl. S. 95.

107-3 Vergl. S. 69. 70. 79. 80.

107-4 Vergl. S. 13. 14.

107-5 Vergl. S. 69.

108-1 Cabinetsschreiben an den kriegsgefangenen österreichischen Oberstlieutenant Prinz Johann von Liechtenstein, d. d. Breslau 10. März. Es wird hinzugefügt: „J'ai trop de confiance sur votre digne manière de penser pour m'imaginer que vous soyez jamais capable d'imiter différents autres officiers mes prisonniers de guerre qui, contre leur engagement et les règles de l'honneur et de la guerre, n'ont pas hésité de se laisser employer là-bas au service, comme j'ai été très bien informé.“