<262>réchal de Noailles, qui, quant à lui, le couvre de honte et de confusion, et qui, quant à moi, dérange extrêmement les mesures que j'avais prises, car dans quel embarras ne serais-je pas, si, uniquement par la faute des Français, avant que j'aurais pris Prague, le prince Charles venait la secourir ou se jeter dans le fameux camp de Budweis? Aussi veux-je que vous fassiez des plaintes amères au roi de France, et lui en représentiez les conséquences, si l'on néglige encore le conseil que vous avez suppédité de suivre de fort près les Autrichiens par Pforzheim vers Cannstadt à Geislingen pour les y atteindre. J'avoue que je ne sais plus ce que j'aurai à attendre de la France; aussi, pour que je sois en état de prendre mes mesures là-dessus, vous m'avertirez au plus tôt possible par un exprès si on a suivi votre conseil et de quelle manière on l'a exécuté, et 2°, si l'armée impériale, avec les troupes qu'on a promis d'y joindre, sont actuellement en marche pour suivre les Autrichiens et pour entrer en Bavière.

Je trouve excellente la réponse que vous avez faite au maréchal de Seckendorff, et j'approuve fort les mémoires que vous avez présentés à MM, de Belle-lsle et d'Argenson; si de pareils avis ne peuvent pas rendre sages des gens, qui pour leur propre bien, dussent penser de soimême à cela, il n'y a rien plus à attendre d'eux. Je me flatte pourtant qu'on redressera la faute lourde qu'on a faite à l'insu et contre les ordres exprès du Roi, lequel je n'accuse d'aucune manière, sachant bien que, sans l'indisposition qui l'a pris, les affaires auraient pris un tout autre tour. Je viens néanmoins de lui écrire une lettre assez énergique, que vous trouverez ci-close avec sa copie. Vous vous concerterez avec Chambrier sur l'usage que vous en ferez et sur la façon dont vous vous prendrez pour la présenter à Sa Majesté Très Chrétienne. Bien que vous ayez à faire des plaintes amères contre le procédé du maréchal de Noailles, vous n'aigrirez pourtant trop le roi de France et tâcherez, en lui présentant ma lettre, de le tranquilliser sur les expressions un peu fortes qui y sont, en lui représentant toutes les raisons de la juste douleur que j'avais eue sur l'événement passé, et les suites qui en pourraient résulter, si l'on ne répare pas, par des efforts bien prompts et efficaces, la faute qu'on a faite. Je n'ai pas voulu faire mention de la demande d'un autre général,1 afin de ne pas me mêler trop des affaires du Roi.

Je suis fâché de la disgrâce de la duchesse de Châteauroux. Quant à la demande que le comte d'Argenson vous a faite de la part du Roi son maître, de lui communiquer ce qui m'est revenu depuis la catastrophe du marquis de La Chétardie, vous saurez que, depuis son départ de Moscovie les affaires de Russie sont encore dans le même état d'incertitude qu'elles ont été avant ce temps là, que Tyrawley n'a gagné guère de pays, quoique par ses libéralités il ait gagné tout-à-fait les Bestushew, mais que nonobstant cela, parceque le comte Woronzow,



1 Schmettau batte berichtet (22. August): „Belle-Isle et d'Argenson sont persuadés que c'est le temps que Votre Majesté demande au Roi un autre général.“