2400. AU CONSEILLER ANDRIÉ A LONDRES.

Potsdam, 5 novembre 1746.

Les relations que vous m'avez faites en date du 18 et du 21 du mois dernier d'octobre, m'ont été rendues à la fois, et les sentiments favorables que milord Harrington vous a réitérés à mon égard, avec les assurances que vous me donnez par rapport à la sincérité du ministère britannique, m'ont fait un plaisir extrême. Comme le sieur Villiers vient d'arriver à Londres, vous ne manquerez pas de vous conformer aux ordres que je vous ai donnés à son sujet et me manderez quand c'est que vous croyez qu'il pourra être de retour chez moi.

Vous m'avez mandé, il y a quelque temps, que le comte de Rosenberg, ministre de la cour de Vienne, n'avait été point du tout content de son séjour de Londres, et que d'ailleurs il avait été peu goûté tant du Roi que des ministres; malgré cela, il y a des lettres de la Haye qui m'apprennent qu'on savait, d'une manière à ne pouvoir en douter, que le comte de Rosenberg était parti de Londres extrêmement satisfait du Roi; que lui-même avait écrit à un de ses amis à la Haye qu'à son arrivée à Londres il avait trouvé les esprits fort prévenus contre lui et qu'on s'était imaginé qu'il n'avait fait ce voyage que pour tâcher de faire changer le ministère, mais qu'on était bientôt revenu des préjugés que l'on avait conçus contre lui, que les commissions dont il avait été chargé avaient succédé à souhait, qu'on verrait dans la suite que son voyage n'avait pas été inutile, qu'il avait eu occasion de rendre de grands services à l'Impératrice, et qu'il partait aussi content qu'on pouvait l'être. Qu'on savait d'ailleurs que le comte de Rosenberg, fâché de ce que, pendant son séjour à la Haye, le sieur Trevor n'avait pas donné tête baissée dans ses vues, avait sollicité à Londres le rappel de ce ministre, et que le roi d'Angleterre, déférant à sa demande, avait pris la résolution de laisser le comte de Sandwich à la Haye, avec le caractère d'ambassadeur, et de rappeler le sieur Trevor, pour lui donner une charge de trésorier en Irlande; que le rappel du sieur Trevor, dont la cour de Londres était fort contente, prouvait que le comte de Rosenberg ait été effectivement goûté du roi d'Angleterre, et que ce qu'il avait écrit à son ami à la Haye n'était pas destitué de fondement.

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Voilà l'avis que le sieur d'Ammon me donne, me marquant en même temps que toutes ces circonstances lui avaient été dites dans la dernière confidence, et qu'il osait m'en assurer la certitude. Comment donc concilier cela avec les rapports que vous m'avez faits à l'égard du comte Rosenberg? et ne paraît-il pas par là que le comte ait fait bien des choses, pendant son séjour à Londres, qui ne sont nullement venues à votre connaissance? ainsi n'ai-je pas lieu de me plaindre que vous êtes trop confiant quand on vous donne à garder pour vous désorienter, et que vous ne guettez pas assez les gens, mais vous laissez endormir par de beaux dehors?

Quant au post-scriptum chiffré que vous m'avez fait le 21 du mois d'octobre passé, j'en suis bien satisfait; mais comme je voudrais que vous entriez encore plus dans le détail par rapport au personnel du Roi et de sa façon de penser sur mon égard en différentes occasions, afin de m'en pouvoir former une idée assez claire, vous ne manquerez pas de me satisfaire là-dessus et de m'en envoyer directement votre rapport, sans en faire un duplicat à mon ministère. Vous devez en même temps vous étendre encore plus sur le personnel du prince des Galles et ce qu'on en peut attendre lorsqu'il viendra un jour à régner; de plus, si vous croyez qu'il y aura moyen alors de constater une amitié ferme et durable entre lui et moi ou ma maison. Ce que vous ne manquerez pas à m'expliquer avec toute l'exactitude possible.

Federic.

Nach dem Concept.