2680. AU MINISTRE D'ÉTAT COMTE DE FINCKENSTEIN A SAINT-PÉTERSBOURG.

Potsdam, 24 juin 1747.

J'ai reçu votre dépêche du 6 de ce mois. C'est la convention des subsides entre l'Angleterre et la Russie qui doit dans le moment présent occuper principalement votre attention, pour bien approfondir si elle est signée à Pétersbourg entre les cours respectives, et pour être exactement instruit alors de toutes les conditions qu'on y a stipulées. Je dois vous avertir que je soupçonne extrêmement l'Angleterre qu'elle couve encore quelque dessein contre la succession présente, établie en Suède, et indirectement contre moi, et je sais de science certaine qu'il y a eu un plan formé entre les cours d'Angleterre et de Danemark pour une révolution en Suède, qui a dû aboutir à un changement de succession en faveur du duc de Cumberland, et que, pour cet effet, l'escadre du Danemark qu'on a armée à Copenhague a dû être le 20 du mois de mai passé dans les ports de Suède, projet qui n'a échoué que parceque l'on a été informé de la détermination- des États de Suède pour s'allier avec moi. Comme je connais la passion outrée que le roi d'Angleterre a pour le duc de Cumberland et pour lui faire trouver quelque établissement, j'ai lieu de présumer qu'on a trempé dans l'affaire de Blackwell418-1 et que l'on ne voudra pas encore abandonner ce projet, mais qu'on tâchera de mettre la Russie de la partie pour le faire réussir encore s'il est possible, et que c'est par cette raison-là qu'on fait jouer tous les ressorts imaginables pour indisposer le plus que l'on peut l'impératrice de Russie contre la personne du successeur à la couronne de Suède; ainsi donc vous devez être fort attentif sur tout ce que l'on voudra tramer à ce sujet.

Au surplus, c'est avec satisfaction que j'ai vu par votre dépêche que l'ami intrépide418-2 continue toujours à être dans ses anciennes dispositions à mon égard. Vous l'entretiendrez soigneusement dans ces sentiments et tâcherez d'en tirer habilement tout le profit possible pour mes intérêts, quoique d'une façon que mon grand antagoniste n'en puisse être scandalisé ouvertement. Je viens d'ailleurs d'ordonner au banquier Splitgerber de vous faire payer de son comptoir à Pétersbourg la somme de 4,000 roubles, dont il vous avertira dans un sens caché par la poste d'aujourd'hui. Comme c'est la somme que je dois à l'ami intrépide depuis le premier d'août de l'année passée jusqu'au premier d'août de<419> l'an présent, vous prendrez cet argent dudit comptoir d'une manière qui ne laisse rien soupçonner et m'acquitterez de ce que je dois à l'ami intrépide, en l'assurant de toute ma bienveillance et de mon amitié constante. Au reste, vous observerez de ne répondre à tout ce que dessus que par les dépêches que vous me ferez à moi seul et à mes mains propres.

Federic.

Nach dem Concept.



418-1 Vergl. S. 415.

418-2 Lestocq.