3274. AU MINISTRE D'ÉTAT COMTE DE FINCKENSTEIN A SAINT-PÉTERSBOURG.

Potsdam, 30 septembre 1748.

Votre dépêche du 14 de ce mois m'est bien parvenue. C'est présentement une chose très décidée que les Russes ne seront point admis au congrès d'Aix-la-Chapelle. Il commence à m'être assez indifférent que l'Impératrice mette effectivement en exécution son voyage projeté de Moscovie ou qu'elle reste à Pétersbourg, les circonstances de la maladie du roi de Suède commençant à aller en mieux, de sorte qu'on n'a pas à craindre d'un jour à l'autre la mort de ce Prince, mais qu'il pourrait facilement traîner encore jusqu'au printemps prochain. Le corps des Russes auxiliaires a passé la Bohême; en cas qu'il voulût suspendre sa marche, il faudrait qu'il le fît en Moravie, pour y hiverner jusqu'au commencement du mois de mars prochain. Il ne saurait revenir de fort grands avantages à la reine de Hongrie de la prolongation du séjour de ce corps en Allemagne, tout prince de l'Empire, quel qu'il soit, sachant à l'heure qu'il est que ces troupes, se trouvant à la solde des Puissances maritimes, dépendent absolument et uniquement de leur disposition. La cour de Vienne, outre cela, ne se trouve pas, de beaucoup près, dans cette bonne intelligence avec les Puissances maritimes où elle était autrefois, les chicanes et les brouilleries qui subsistent actuellement entre la susdite cour et ces dernières, les animant réciproquement entre elles. Ajoutez à cela la difficulté qui est survenue aux Puissances maritimes, et que je ne sais point comment elles s'y prendront<250> pour la résoudre, savoir la convention qui a été signée à Aix-la-Chapelle entre les ministres de l'Angleterre et de France sur la rétrogradation du corps des troupes russiennes, la France ayant effectivement, en conséquence de ladite convention et dans la persuasion que ces Russes rétrograderaient entièrement, fait évacuer à quelques-unes de ses troupes les Pays-Bas et en ayant même réformé une partie.250-1 Les Russes venant ainsi à faire halte en Moravie, les Puissances maritimes rompent par là leur convention avec la France, ce qui, bien considéré, pourrait rendre toute cette affaire plus épineuse que peut-être on n'a pu le croire au commencement. Comme, au reste, il est à supposer que le corps de troupes en question ne rentrera en Russie que très mal accommodé et dans un état piteux, je serais bien aise que vous me dissiez, selon votre pénétration ordinaire, si le ministère russien ne serait point porté par là à aller un peu plus bride en main, avant que de consentir, à l'avenir, à faire marcher des troupes de sa souveraine.

Federic.

Nach dem Concept.



250-1 Vergl. S. 220.