<146> une âme laborieuse dans un corps robuste; jamais homme ne fut né avec un esprit aussi capable de détails. S'il descendait jusqu'aux plus petites choses, c'est qu'il était persuadé que leur multiplicité fait les grandes. Il ramenait tout son ouvrage au tableau général de sa politique, et travaillant à donner le dernier degré de perfection aux parties, c'était pour perfectionner le tout.
Il retrancha toutes les dépenses inutiles, et boucha les canaux de la profusion, par lesquels son père avait détourné les secours de l'abondance publique à des usages vains et superflus. La cour se ressentit la première de cette réforme; il ne conserva qu'un nombre de personnes nécessaires à sa dignité ou utiles à l'État : de cent chambellans qu'avait eus son père, il en resta douze; les autres prirent le parti des armes ou devinrent des négociateurs. Il réduisit sa propre dépense à une somme modique, disant qu'un prince doit être économe du sang et du bien de ses sujets. C'était, à cet égard, un philosophe sur le trône, bien différent de ces savants qui font consister leur science stérile dans la spéculation des matières abstraites qui semblent se dérober à nos connaissances. Il donnait l'exemple d'une austérité et d'une frugalité dignes des premiers temps de la république romaine : ennemi du faste et des dehors imposants de la royauté, sa stoïque vertu ne lui permettait pas même les commodités les moins recherchées de la vie. Des mœurs aussi simples, une frugalité aussi grande, formaient un contraste parfait avec la hauteur et la profusion de Frédéric Ier.
Les objets politiques que ce prince se proposait par ses arrangements intérieurs, étaient de se rendre formidable à ses voisins par l'entretien d'une armée nombreuse. L'exemple de George-Guillaume lui avait appris combien il était dangereux de ne pouvoir pas se défendre; et celui de Frédéric Ier, dont les troupes étaient moins à ce prince qu'aux alliés qui les payaient, lui avait fait connaître qu'un souverain n'est respecté, qu'autant qu'il se rend redoutable par sa