<148> le Czar, le roi Auguste, et Frédéric IV de Danemark, qui s'étaient ligués contre lui.
Frédéric-Guillaume ne voulait point se mêler des troubles du Nord; et, à l'exemple de son père, il observa une exacte neutralité. La situation avantageuse dans laquelle il se trouvait, le nombre de ses troupes, et le besoin que l'on avait de son assistance, le firent rechercher des deux partis. Il voyait que la nature et le voisinage de cette guerre l'obligerait tôt ou tard de s'en mêler : mais il ne perdait rien pour attendre, et peut-être voulut-il voir de quel côté tournerait la fortune, avant que de prendre des engagements qui le lieraient dans la suite.
Cette fatalité, que le vulgaire appelle hasard, les théologiens, prédestination, et dont les sages rejettent la cause sur l'imprudence des hommes, cette fatalité, dis-je, s'opiniâtrait encore également à persécuter Charles XII. Tandis que ce roi perdait son temps à cabaler contre le Czar à Constantinople, son général Stenbock, qui avait exercé des cruautés inouïes sur les malheureux habitants d'Altona, se retira à Tönningen à l'approche des Moscovites et des Saxons. Son dessein était d'y passer l'Eyder sur la glace : son malheur voulut qu'il survint un dégel inopiné; manquant de pont pour passer, et se trouvant entouré des ennemis, il fut contraint de se rendre prisonnier avec les douze mille hommes qu'il commandait.
La perte de ces troupes, et l'ignominie que leur reddition imprimait aux armes suédoises, ne furent que des avant-coureurs de plus grands malheurs qui menaçaient ce royaume. La mauvaise conduite de ce général rejaillit principalement sur la Poméranie suédoise. Les armées moscovites et saxonnes, qui n'avaient plus d'ennemis en tête, se préparaient déjà à entrer dans cette province, qui allait de nouveau devenir le théâtre de la guerre : dans cette appréhension, le duc administrateur de Holstein, et le général Wellingk, gouverneur de la Poméranie, proposèrent au Roi de lui remettre la Poméranie