<160> bisaïeul avait établi son fils légitimé, le duc du Maine, président du conseil de la régence. Ce roi, si absolu pendant sa vie, fut mal obéi après sa mort : le parlement jugea entre le duc d'Orléans et le duc du Maine, ou, pour mieux dire, il s'érigea en arbitre de la dernière volonté du feu roi, et décida que Philippe d'Orléans, premier prince du sang, avait des droits incontestables à la régence.
La politique du nouveau régent se rapporta à deux objets principaux, dont l'un était de maintenir la paix avec ses voisins, ce qui l'engagea à ménager l'amitié de l'Empereur et à s'unir étroitement avec le roi d'Angleterre; et l'autre était d'acquitter les dettes de la couronne, qui étaient immenses, ce qui donna lieu au système de Law, dont le plan était aussi utile que l'abus qu'on en fit devint pernicieux.
Le Régent, doué d'un génie supérieur, avait les défauts des esprits vifs et hardis : les plus vastes idées lui paraissaient aussi simples que les communes; il s'abandonnait aux impressions d'une imagination ardente qui souvent outrait les choses. Né pour les beaux-arts, qu'il cultiva, il eut les faiblesses des héros : son tempérament encourageait son cœur à la sensibilité; il fit l'abbé du Bois cardinal, moins parce qu'il servait l'État, que parce qu'il était le ministre secret de ses passions. La calomnie osa charger ce prince doux et humain du plus horrible des forfaits, du dessein d'empoisonner son pupille et son roi. Un crime utile n'inspire pas moins d'horreur aux âmes bien nées, qu'une mauvaise action perdue; mais l'apologie véritable du Régent, c'est le règne de Louis XV.
Pour assurer la paix du royaume, et pour écarter toutes les occasions de disputes, le Régent conclut le traité de Barrière, à Anvers, par lequel il fut arrêté que les Hollandais entretiendraient garnison dans Namur, Furnes, Tournai, Ypres, Menin et le fort de Knocke, moyennant six cent mille florins d'Allemagne que la maison d'Autriche s'engageait de leur payer par an; en vertu de quoi,