<236>dard de la révolte contre le pape. Les vaudois, les wicléfites et les hussites avaient déjà commencé à remuer; mais Luther et Calvin, aussi audacieux, et nés dans des conjonctures plus favorables, consommèrent enfin ce grand ouvrage.
Les augustins étaient en possession du trafic des indulgences; le Pape chargea les dominicains de les prêcher, ce qui excita une querelle furieuse entre ces deux ordres. Les augustins déclamèrent contre le Pape; Luther, qui était de leur ordre, attaqua avec véhémence les abus de l'Église; il arracha d'une main hardie une partie du bandeau de la superstition; il devint bientôt chef de parti; et, comme sa doctrine dépouillait les évêques de leurs bénéfices, et les couvents de leurs richesses, les souverains suivirent en foule ce nouveau convertisseur.
La religion prit alors une forme nouvelle, et se rapprocha beaucoup de son ancienne simplicité. Ce n'est point ici le lieu d'examiner s'il n'eût pas mieux valu lui laisser plus de pompe et d'extérieur, pour qu'elle en imposât davantage au peuple, qui n'est frappé et ne juge que par les sens : il paraît qu'un culte tout spirituel, et aussi nu que l'est celui des protestants, n'est pas fait pour des hommes matériels et grossiers, incapables de s'élever par la pensée à l'adoration des plus sublimes vérités.
La réforme fut utile au monde, et surtout aux progrès de l'esprit humain : les protestants, obligés de réfléchir sur des matières de foi, se dépouillèrent tout d'un coup des préjugés de l'éducation, et se virent en liberté de se servir de leur raison, de ce guide qui est donné aux hommes pour les conduire, et dont au moins ils devraient faire usage pour l'objet le plus important de leur vie. Les catholiques, vivement attaqués, furent obligés de se défendre; les ecclésiastiques étudièrent, et ils sortirent de l'ignorance crasse et honteuse dans laquelle ils croupissaient presque généralement.
S'il n'y avait qu'une religion dans le monde, elle serait superbe et