<44>Homme si fier, homme si vain
De ce que ton faible esprit pense,
Connais ton fragile destin,
Et réprime ton arrogance.
Ton terme est court, il est borné,
Le sort, du jour où l'homme est né,
L'entraîne vers la nuit fatale;
Là, dans la foule confondus,
Les Virgile, les Mévius
Ont une destinée égale.
Vous que séduit l'éclat trompeur
D'un bien passager et frivole,
Vous qui d'un métal suborneur
Avez fait votre unique idole,
Pour qui voulez-vous l'amasser?
Vous que le monde voit passer
Comme une fleur qui naît et tombe,
Mortels, déplorez vos erreurs :
Vos richesses et vos grandeurs
Vous suivront-elles dans la tombe?
Comment à tant de vains objets
Immole-t-on sa destinée?
Comment tant de vastes projets
Pour une course aussi bornée?
Héros qui préparez des fers
A ce malheureux univers
Pour établir votre mémoire,
Rappelez-vous ces conquérants
Inscrits dans les fastes du temps :
Pourrez-vous égaler leur gloire?