<47>Connaissons notre aveuglement,
Nos préjugés et nos faiblesses;
Tout ce qui nous paraît si grand
N'est qu'un amas de petitesses.
Transportons-nous au haut des cieux,
De sa gloire jetons les yeux
Sur Paris, sur Pékin, sur Rome;
Leur grandeur disparaît de loin,
Toute la terre n'est qu'un point;
Ah! que sera-ce donc de l'homme?
Nous nageons, pleins de vanité,
Entre le temps qui nous précède
Et l'absorbante éternité
De l'avenir qui nous succède;
Toujours occupés par des riens,
Les vrais Tantales des faux biens,
Sans cesse agités par l'envie,
Pleins de ce songe séduisant,
Nous nous perdons dans le néant :
Tel est le sort de notre vie.
A Berlin, ce 18 de décembre 1749.