<64>Un ustensile abject ou le saint qu'on révère;
Sa matière est égale, et c'est sa volonté
Qui seule en fait l'usage, et forme sa beauté.
Ainsi tous ces humains dont la terre fourmille
Sont fils d'un même père et font une famille,
Et, malgré tout l'orgueil que donne votre rang,
Ils sont nés vos égaux, ils sont de votre sang.
Ouvrez toujours le cœur à leur plainte importune,
Et couvres leur misère avec votre fortune;
Voulez-vous en effet paraître au-dessus d'eux,
Montrez-vous plus humain, plus doux, plus vertueux.
Tels ont été les grands dont l'immortelle gloire
Se grave en lettres d'or au temple de Mémoire;
Leur âme juste et pure, et surtout leur bonté,
Ennoblit à mes yeux la faible humanité;
Mon cœur, en les nommant, est ému de tendresse,
On fait en leur faveur grâce à toute l'espèce,
Pères de leurs sujets, délices des humains,
Leur nom devient le nom des meilleurs souverains.
Il est un monstre affreux né de la perfidie,
Cruel dans ses excès et calme en sa furie;
Son visage hideux se cache sous le fard,
Son souffle est venimeux, sa langue est un poignard.
La trahison l'arma de ses noirs artifices,
Il fut par Tisiphone endurci dans les vices,
Il respire le meurtre, il blesse en caressant,
Il défend le coupable, il poursuit l'innocent,
De ses traits empestés l'atteinte est incurable :
L'affreuse Calomnie est son nom redoutable.a
Craignez d'être surpris par ce monstre trompeur,
Fuyez de ses complots la cruelle noirceur,


a Voyez ci-dessus, p. 3.