<132>Peint les héros couronnés de lauriers;
Mais ce seront des efforts de courage
Qu'Hercule aurait eu peine d'égaler :
Voir de la mort la redoutable image,
Et cependant agir sans s'ébranler.
Venons au fait; tableau d'après nature
N'a pas besoin d'être orné de bordure.
Ceci n'est point la légende d'un saint,
Mais un grand fait reconnu pour certain.
La Knesebeck, sur un beau char portée,
Se promenait au parc près de Berlin;
D'un ciel tout clair l'aspect l'avait tentée
De respirer un air pur et serein,
Qu'en toute ville opulente, habitée,
Il faut chercher dans les champs au lointain.
Son char à peine a passé la limite
De nos remparts, que ses coursiers ardents
Trop ressemblants aux chevaux d'Hippolyte,
Bientôt fougueux, prennent le mors aux dents.
Mais aucun monstre à gueule flamboyante,
Le dos couvert d'écaillé jaunissante,
Du fond des eaux sur eux ne s'élança;
Un hasard seul ainsi les courrouça.
Mon héroïne, en gardant contenance,
Vit sans pâlir la grandeur, l'éminence
Du sort affreux qui ses jours menaça.
Là se présente à son âme assurée
Les flots profonds des rives de la Sprée;
Ah! quel spectacle affreux et plein d'horreur,
D'être exposée à se voir bien mouillée,
Et qui pis est, engloutie ou noyée!