<161>C'est dans les grands dangers qu'une âme magnanime
Peut déployer la force et le pouvoir sublime
Du courage d'esprit.
Qu'importe la tempête et Jupiter qui tonne?
L'homme qui, plein d'effroi, lui-même s'abandonne
Est le seul qui périt.
Le souverain des dieux, de ses mains libérales,
Répand sur les humains, de deux urnes égales,
Et les biens et les maux;
Tandis que la nature attentive, assidue,
Fait naître en même temps la casse et la ciguë,
Le cèdre et les roseaux.
Ce mélange fâcheux de souffrance et de gloire
De l'archive des temps remplit la longue histoire
De désastres cruels.
Un bonheur toujours pur, dont l'éclat se conserve,
Se refuse à nos vœux; le destin le réserve
Pour les dieux immortels.
Au courage obstiné la résistance cède,
Un noble désespoir est l'unique remède
Aux maux désespérés;
Le temps met fin à tout, rien n'est longtemps extrême,
Et souvent le malheur devient la source même
Des bonheurs désirés.
Les aquilons mutins d'un ormeau qu'on néglige
Par leurs fougueux assauts font incliner la tige,
Qui cède pour un temps;