<182>Butors de race impertinente,
Notre carrosse en cent lieux accroché,
Nous allions gravement, d'une allure indolente,
Gravitant contre les rochers.
Les airs émus par le bruyant tonnerre,
Les torrents d'eau répandus sur la terre,
Du dernier jour menaçaient les humains;
Et malgré notre impatience,
Quatre bons jours en pénitence
Sont pour jamais perdus dans les charrains.
Si toutes nos fatalités s'étaient bornées à ce qui arrête un voyage, nous aurions pris patience; mais après des chemins affreux nous avons trouvé des gîtes plus affreux encore.
Car des hôtes intéressés,
De la faim nous voyant pressés,
D'une façon plus que frugale,
Dans une chaumière infernale,
En nous empoisonnant, nous volaient nos écus.
O siècle différent des temps de Lucullus!
Des chemins affreux, mal nourris, mal abreuvés, ce n'était pas tout; nous essuyâmes encore bien des accidents; et il faut assurément que notre équipage ait eu un air bien singulier, puisque, à chaque endroit où nous passâmes, on nous prit pour quelque chose d'autre.
Les uns nous prenaient pour des rois,
D'autres pour des filous courtois,
D'autres pour gens de connaissance;
Parfois le peuple s'attroupait,
Entre les yeux nous regardait
En badauds curieux, remplis d'impertinence.
Notre vif Italiena jurait,
a Algarotti.