<86> sont si utiles à la monarchie française. Je vois, Sire, que vous suivez mon exemple, et que vous ne vous écartez pas de mes principes. Vous ne perdez pas de vue les véritables ennemis de la France, et, en ne vous éloignant jamais de cette saine politique, vous égalez les exploits de Gustave-Adolphe. Ah! que j'applaudis aux sages mesures que prend Votre Majesté pour donner des bornes aux vastes projets de la maison d'Autriche! C'est donc vous qui mettez un frein à sa cupidité et à son ambition? Vous êtes, Sire, le meilleur allié qu'ait jamais eu la France. Il ne manquait à mon bonheur que d'être né votre contemporain.
Quoique les choses soient bien changées depuis ma mort, je suis cependant au fait de la situation présente des affaires tout comme si j'en étais encore chargé. Le cardinal de Fleury, dont l'ombre aimable est descendue dans ces contrées délicieuses, m'a appris que la Franche-Comté, l'Alsace et la Lorraine étaient soumises à la domination française, et que la maison de Bourbon régnait en Espagne et en Italie. Il m'a dit qu'un nouveau rejeton était sorti des cendres de la maison d'Autriche éteinte, et que ce rejeton, poussant de profondes racines, acquérait plus de forces par l'arrangement admirable de ses finances et par la discipline de ses troupes qu'il n'en avait perdu par le démembrement de plusieurs provinces. Le cardinal de Fleury m'a fait encore remarquer la conduite artificieuse de cette nouvelle maison d'Autriche, qui, avec autant d'ambition que la première, sait couvrir ses piéges de fleurs, qui va par la sape au lieu de donner des assauts, qui endort ses ennemis au lieu de les combattre, et qui emprunte toutes sortes de formes pour cacher la véritable. Vous avez, Sire, comme un autre Hercule, obligé ce Protée à reprendre sa figure naturelle, et vous avez opposé la digue de vos victoires au débordement de son ambition.
Nous, Sire, habitants de l'Élysée, dont l'esprit subtil est dégagé