<223> est ménagé à proportion de la capacité de chacun, il ne nuit jamais. Un mouvement proportionné à nos forces rétablit nos organes; est-il excessif, il les affaiblit, et les détruit ensuite.
Qui voudrait imiter Hercule,
Qui satisfit cent filles en un jour?
On craint toujours pareil émule
Dans la carrière de l'amour.
A beau mentir qui vient de loin; or cette histoire nous est venue du pays de la Fable, pays aussi éloigné de nous que le sont les terres australes de notre continent. Nous sommes donc faits pour le plaisir, comme le poisson est fait pour l'eau. La disposition de nos organes à la vue du plaisir prouve que nous sommes faits pour lui; cette disposition change à proportion de la force de l'impression qu'occasionne la présence du plaisir. Nous sentons de la répugnance pour ce qui peut nous nuire, et nous sentons une force qui nous entraîne vers les objets qui peuvent nous causer de la satisfaction.
Un pouvoir secret nous entraîne
Vers le plaisir, malgré notre raison;
Elle a beau susciter obstacles à foison,
Nature sait les surmonter sans peine.
Cette force est si puissante, qu'elle dissipe même la crainte naturelle au beau sexe; l'amour inspire du courage et de la fermeté aux personnes qui naturellement en ont le moins. Cette passion fait plus de héros que l'ambition et l'amour de la gloire. La présence du plaisir a cet avantage, c'est que par son influence, dont j'ignore l'origine, elle concentre tellement l'homme, qu'il n'est plus occupé que des moyens de rendre les hommages qu'on exige. A la vue du danger, la raison de notre conservation et l'amour de la gloire se trouvent dans un conflit de juridiction; chacun se croit en droit de la prééminence, et se récrie sur ses prérogatives. Il n'en est pas de même du plaisir; il étouffe toutes les idées qui ne se rapportent point à son ser-