<251> et de la morale politique, si, après avoir fait humainement ce qui dépend de moi pour remplir mes engagements, je suis obligé de ne m'en point départir, lorsque je vois, d'un côté, un allié qui n'agit point, de l'autre, un allié qui agit mal, et que, pour surcroît, j'ai l'appréhension, au premier mauvais succès, d'être abandonné, moyennant une paix fourrée, par celui de mes alliés qui est le plus fort et le plus puissant.
Je demande si, dans un cas où je prévois la ruine de mon armée, l'épuisement de mes trésors, la perte de mes conquêtes, le dépeuplement de l'État, le malheur de mes peuples, et, en un mot, toutes les mauvaises fortunes auxquelles exposent le hasard des armes et la duplicité des politiques; je demande si, dans un cas semblable, un souverain n'a pas raison de se garantir par une sage retraite d'un naufrage certain ou d'un péril évident.
Nous demandez-vous de la gloire? Mes troupes en ont suffisamment acquis. Nous demandez-vous des avantages? Les conquêtes en font foi. Désirez-vous que les troupes s'aguerrissent? J'en appelle au témoignage de nos ennemis, qui est irrévocable. En un mot, rien ne surpasse cette armée en valeur, en force, en patience dans le travail et dans toutes les parties qui constituent des troupes invincibles.
Si l'on trouve de la prudence à un joueur qui, après avoir gagné un sept-leva, quitte la partie, combien plus ne doit-on point approuver un guerrier qui sait se mettre à l'abri des caprices de la fortune après une suite triomphante de prospérités!
Ce ne sera pas vous qui me condamnerez, mais ce seront ces stoïciens dont le tempérament sec et la cervelle brûlée inclinent à la morale rigide. Je leur réponds qu'ils feront bien de suivre leurs maximes, mais que le pays des romans est plus fait pour cette pratique sévère que le continent que nous habitons, et que, après tout, un particulier a de tout autres raisons pour être honnête homme qu'un souverain. Chez un particulier, il ne s'agit que de l'avantage