<179> dont vous me parlez avec la plus grande impatience. J'ai toujours été persuadé que vous viendrez à la fin au point de détruire tous les projets de vos ennemis; et, dans les temps qui paraissaient les plus nébuleux, je n'ai jamais douté qu'un beau jour ne dissipât toutes les ombres, et ne rendît à la Prusse et au Brandebourg cette gloire et cette tranquillité dont elle a toujours joui sous votre règne avant cette guerre suscitée par la mauvaise loi et continuée par la folie et l'aveuglement, car comment peut-on nommer autrement l'opiniâtreté insensée des Français? Quoique la folie des convulsions de saint Paris redevienne à la mode à Paris,a ce n'est pas dans cette ville que sont les plus grands fous du royaume; c'est à Versailles, c'est dans le conseil de cette cour qu'il faut les chercher. Quel plaisir de voir un jour de pareils extravagants mortifiés autant qu'ils le méritent! Je ne sais lequel des deux me causera plus de satisfaction, ou de voir la folie française corrigée, ou l'orgueil autrichien réprimé, car Dieu lui-même ne pourrait pas le détruire; il ne peut changer l'essence des choses, et la nature de ces gens est la vanité. Il ne saurait y avoir un Autrichien modeste, de même qu'il ne peut y avoir de la matière sans étendue. Si V. M. lisait toutes les fatuités que la cour de Vienne fait mettre dans diverses gazettes, quelque grande que fût son indignation, elle ne pourrait quelquefois s'empêcher d'en rire. J'avoue naturellement à V. M. que je suis curieux de voir ce qu'ils diront lorsque ce dont elle me fait la grâce de me parler viendra à être public.
Je remettrai les planches à Voss. Cet homme doit vous regarder comme les anciens regardaient le Jupiter hospitalier; il était doublement dieu, premièrement comme une divinité générale, et secondement comme un dieu lare. Vous lui faites le bien que vous faites à tous vos sujets comme roi, et, comme auteur, vous remplissez d'argent sa maison. Un libraire païen vous aurait placé parmi ses pénates, un libraire catholique vous révérerait comme un saint; mais
a Voyez t. I. p. 241.