<232>rance dans l'âme des citoyens et leur rendre le courage. Appliquez-nous ce vers de Sémiramis :
Ailleurs on nous envie, ici nous gémissons.Nous sommes obligés de nous faire des frontières; ce sont des lisières de pays que nous dévastons pour empêcher l'ennemi de nous troubler, l'hiver, dans nos quartiers. Tout ce mois s'écoulera avant que nous puissions nous séparer. Jugez des fatigues et des désagréments que j'essuie; jugez de mes embarras, en vous représentant que je suis réduit à faire subsister et à payer mon armée par industrie. Avec cela, je n'ai pas la moindre compagnie, privé de toutes les personnes que j'aimais, réduit à moi-même, et passant ma vie à partager mes moments entre un travail infructueux et entre mille appréhensions. Voilà un tableau qui n'est point flatté, mais qui vous peint au vrai les choses et ma situation désagréable. Qu'il est différent, mon cher marquis, d'apercevoir ces objets d'une longue distance et par un verre trompeur qui les embellit, ou de les examiner de près, tout nus, et dépouillés du clinquant qui les orne! Vanité des vanités! vanité des batailles! Je finis par cette sentence du sage, qui comprend tout, renferme en soi des réflexions que tous les hommes devraient faire, et que trop peu font. Adieu, cher marquis; ne soyez plus si crédule sur les nouvelles publiques, et conservez-moi votre amitié.
156. AU MÊME.
Neustadt (près de Meissen), 22 novembre 1760.
Malgré tout l'esprit que vous avez, je m'aperçois qu'il y a une grande différence entre les réflexions et les projets qu'un philosophe fait dans