A présent que Schweidnitz est pris,a je prendrai la liberté de vous rappeler un petit traité que V. M. avait bien voulu faire avec moi, mais qui n'a pu être exécuté, par l'opposition qu'y mirent les Autrichiens, que je donne tous de bon cœur au diable. Il y a deux certains paysages de M. Harper qui m'avaient été promis par Frédéric le Grand, si je restais trois semaines sans être malade. J'en avais déjà passé deux, jouissant de la santé d'un Hercule, et voilà que, la troisième, Frédéric part de Potsdam pour aller en Saxe changer son nom de Grand en celui de Très-Grand; et moi, je vois les paysages, gagnés de plus de la moitié, s'en aller en fumée comme les projets des Saxons. Aujourd'hui donc que vous avez pris Schweidnitz, ce qui, selon moi, n'est pas une des moins bonnes choses que vous ayez faites, vous devriez bien en conscience me payer mes deux semaines de santé, et m'ordonner, dans votre première lettre, de prendre les deux tableaux, qui sont par terre, faisant triste figure, au lieu que, dans ma chambre, je les mettrai dans un cadre. Ils réjouiront mon esprit dans les moments d'hypocondrie, et je dirai à tous ceux qui me viendront voir : Regardez, voilà deux tableaux que le Roi m'a donnés. Il me fallait encore huit jours pour qu'ils fussent totalement et de droit à moi. Mais le Roi ne fait pas comme ces vilains Autrichiens, qui violent tant qu'ils peuvent les capitulations; il a écrit de sa main dans sa dernière lettre : accordé, et il aurait pu cependant, sans manquer à sa parole, mettre : refusé. J'ai l'honneur, etc.
a Il le fut le 9 octobre. Voyez t. V, p. 230, et t. XVIII, p. 169.