<134> qu'on apprit que le prince de Lorraine quittait la Moravie, et marchait par Teutsch-Brod et Zwittau pour entrer en Bohême. On sut même que le maréchal de Königsegg, qui commandait cette armée à latere, avait dit qu'il fallait tirer droit sur Prague, et combattre les Prussiens chemin faisant : il ne les croyait forts que de quinze mille hommes, et sa supériorité assez considérable pour attaquer un corps aussi faible sans rien hasarder. Bien des personnes condamnèrent ce maréchal, que faisant la guerre dans les propres États de la Reine, il était aussi mal informé qu'il l'était : ce n'était pas tout à fait sa faute; la Bohême inclinait plus pour les Bavarois que pour les Autrichiens; d'ailleurs les Prussiens étaient vigilants, et observaient attentivement les personnes qui pouvaient les trahir; et enfin, des troupes arrivaient, d'autres partaient, de façon que ces mouvements étaient difficiles à débrouiller, qu'un campagnard ne pouvait les débrouiller. Voilà les jugements qu'on porte des militaires. Leur art est conjectural; ils peuvent être mal servis de leurs espions; leurs dispositions peuvent être mal exécutées, et c'est eux qu'on blâme : et cependant l'ambition, flattée par le commandement des armées, s'empresse de l'obtenir.
A l'approche des Autrichiens, le Roi avait le choix de deux partis, ou de mettre l'Elbe devant soi, ou d'aller à la rencontre du prince de Lorraine et de le combattre. Ce dernier parti prévalut, non seulement comme le plus glorieux, mais encore comme le plus utile, parce qu'il devait hâter la paix; les négociations, comme nous l'avons dit, demandant un coup décisif. L'armée du Roi s'assembla aussitôt36 auprès de Chrudim, qui en faisait le centre; la droite fut appuyée à Trzenitz, et la gauche, au ruisseau de la Chrudimka. Les batteurs d'estrade, les espions, et les déserteurs de l'ennemi avertirent que le prince de Lorraine allait camper ce même jour à Setsch et Boganow, et qu'il voulait y séjourner le 15. On apprit d'autre part qu'un dé-
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