<81>Le jour suivant, la neige fut si épaisse, qu'à peine distinguait-on les objets à vingt pas; cependant on apprit que l'ennemi s'était approché de Brieg. Si ce mauvais temps avait continué, l'embarras des Prussiens n'aurait fait que s'accroître : les vivres commençaient à devenir rares; il fallait secourir Ohlau, et en cas de malheur il n'y avait aucune retraite; mais la fortune suppléa à la prudence.
Le lendemain, 10 d'avril, le temps parut clair et serein; et, quoique la terre fût couverte de deux pieds de neige, rien ne s'opposait aux opérations qu'on voulait entreprendre. Dès les cinq heures du matin, l'armée se rassembla auprès du moulin de Pogarell : elle consistait en vingt-sept bataillons, vingt-neuf escadrons de cavalerie et trois de hussards. Elle se mit en marche sur cinq colonnes : celle du milieu était d'artillerie; les deux plus voisines du centre, d'infanterie; et les deux aux extrémités des ailes, de cavalerie. Le Roi savait que l'ennemi lui était supérieur en cavalerie : pour obvier à cet inconvénient, il mêla entre les escadrons de chaque aile deux bataillons de grenadiers; c'était une disposition dont Gustave-Adolphe avait fait usage à la bataille de Lützen, et dont selon toute apparence on ne se servira plus.
L'armée s'avança dans cet ordre vers l'ennemi, en suivant la direction du chemin qui mène à Ohlau. Le général Rottembourg,a qui menait l'avant-garde, en passant auprès du village de Pampitz prit une vingtaine de prisonniers, qui confirmèrent l'avis que des paysans du village de Mollwitz étaient venus donner au Roi, que l'armée ennemie était cantonnée dans Mollwitz, Grüningen et Hünern. Dès que les colonnes se trouvèrent à deux mille pas environ de Mollwitz, l'armée se déploya pour se mettre en bataille, sans qu'on vît paraître d'ennemis en campagne. La droite devait s'appuyer au village de Herrendorf :b M. de Schulenbourg, qui commandait la
a Le colonel comte Rottembourg devint général-major le 31 octobre 1741.
b Hermsdorf.