42. AU MÊME.
Meissen, 26 novembre 1762.
J'ai reçu, mon cher mylord, votre lettre et celle du philosophe sauvage. Il faut avouer que l'on ne saurait pousser le désintéressement plus loin qu'il le fait; c'est un grand pas à la vertu, si ce n'est la vertu même. Il veut que je fasse la paix; le bonhomme ne sait pas la diffi<325>culté qu'il y a d'y parvenir, et, s'il connaissait les politiques avec lesquels j'ai affaire, il les trouverait bien autrement intraitables que les philosophes avec lesquels il s'est brouillé.
Nous allons entrer dans les quartiers d'hiver; la campagne est heureusement écoulée.
Vous me demandez mon portrait; je ne sais, mon cher mylord, s'il en existe. Je vous envoie une figure plus aimable que la mienne, et qui vous fera plus de plaisir; il est bien juste que je donne une tabatière à celui qui m'a tant fourni de tabac. Vos Anglais me donnent bien de la tablature, et votre cher compatriote Bute325-a est un singulier seigneur. Adieu, mon cher mylord; comptez toujours sur mon amitié, car mon cœur est tout à vous.
325-a Voyez t. V, p. 173 et suivantes.