<247> France avec cinquante mille livres de bien, est mort ruiné, et que feu M. le duc d'Orléans est mort avec sept millions de dettes exigibles, que son fils a eu bien de la peine à payer.

Le vrai peut quelquefois n'être pas vraisemblable.a

Ce n'est pas que je croie que le génie plaisant qui bouleverse tout dans ce monde, et qui se moque de nous, fasse toute la besogne. Les puissances qui, par la suite des temps, par la guerre, par les mariages, etc., sont devenues plus fortes que leurs voisins, feront tout ce qu'il faudra pour les engloutir, comme le riche seigneur accable son pauvre voisin; et c'est là ce qu'on appelle grande politique; c'est là ce que votre âme adorable appelle grande injustice, grande horreur. Votre politique consiste à empêcher l'oppression. Tous les princes devraient avoir gravés sur la table de leur conseil et sur la lame de leurs épées ces mots par lesquels V. A. R. finit : « C'est un opprobre de perdre ses États, c'est une rapacité punissable d'envahir ceux sur lesquels on n'a point de droit.b » Ce sont là les paroles d'un grand homme, et le gage de la félicité de tout un peuple.

Il faut que V. A. R. pardonne une idée qui m'a passé par la tête plus d'une fois. Quand j'ai vu la maison d'Autriche prête à s'éteindre, j'ai dit en moi-même : Pourquoi les princes de la communion opposée à Rome n'auraient-ils pas leur tour? ne pourrait-il se trouver parmi eux un prince assez puissant pour se faire élire? la Suède et le Danemark ne pourraient-ils pas l'aider? et, si ce prince avait de la vertu et de l'argent, n'y aurait-il pas à parier pour lui? ne pourrait-on pas rendre l'Empire alternatif comme certains évêchés qui appartiennent tantôt à un luthérien, tantôt à un romain? Je prie V. A. R. de me pardonner ce tome des Mille et une Nuits.


a Boileau, Art poétique, chant III, v. 48.

b Voyez t. VIII, p. 30.