<432>correspondance avec Marc-Aurèle. S'il n'y a point de lettre perdue, ils peuvent perdre tout ce qui m'appartient, sans que je m'en plaigne.
J'avais l'honneur, dans cette lettre, de dire à V. A. R. que je suis sur le point de rendre public ce catéchisme de la vertu, et cette leçon des princes dans laquelle la fausse politique et la logique des scélérats sont confondues avec autant de force que d'esprit. J'ai pris les libertés que vous m'avez données; j'ai tâché d'égaler à peu près les longueurs des chapitres à ceux de Machiavel; j'ai jeté quelques poignées de mortier dans un ou deux endroits d'un édifice de marbre. Pardonnez-moi, et permettez-moi de retrancher ce qui se trouve, au sujet des disputes de religion, dans le chapitre XXI.
Machiavel y parle de l'adresse qu'eut Ferdinand d'Aragon de tirer de l'argent de l'Église sous le prétexte de faire la guerre aux Maures, et de s'en servir pour envahir l'Italie. La reine d'Espagne vient d'en faire autant. Ferdinand d'Aragon poussa encore l'hypocrisie jusqu'à chasser les Maures pour acquérir le nom de bon catholique, fouiller impunément dans les bourses des sots catholiques, et piller les Maures en vrai catholique. Il ne s'agit donc point là de disputes de prêtres et des vénérables impertinences des théologiens de parti, que vous traitez ailleurs selon leur mérite.
Je prends donc, sous votre bon plaisir, la liberté d'ôter cette petite excrescence à un corps admirablement conformé dans toutes ses parties. Je ne cesse de vous le dire, ce sera là un livre bien singulier et bien utile.
Mais quoi! mon grand prince, en faisant de si belles choses, V. A. R. daigne faire venir des caractères d'argent d'Angleterre, pour faire imprimer cette Henriade! Le premier des beaux-arts que V. A. R. fait naître est l'imprimerie. Cet art, qui doit faire passer vos exemples et vos vertus à la postérité, doit vous être cher. Que d'autres vont le suivre, et que Berlin va bientôt devenir Athènes! Mais enfin le