<97>muniquer. Je réussis assez en amour, mais mal en poésie. Depuis ce temps, j'ai été amoureux assez souvent, et toujours poëte.
Si vous savez quelque secret pour guérir les hommes de cette manie, vous ferez vraiment œuvre chrétienne de me le communiquer; sinon je vous condamne à m'enseigner les règles de cet art enchanteur que vous avez embelli, et qui, à son tour, vous fait tant d'honneur.
Nous autres princes, nous avons tous l'âme intéressée, et nous ne faisons jamais de connaissances que nous n'ayons quelques vues particulières, et qui regardent directement notre profit.
Que Césarion est heureux! Il doit avoir passé des moments délicieux à Cirey. Quels plaisirs surpassent en effet ceux de l'esprit? J'ai fait des efforts d'imagination surprenants pour l'accompagner; mais ni mon imagination n'est assez vive, ni mon esprit assez délié pour l'avoir pu suivre. Contentez-vous, monsieur, de mes efforts, tandis qu'il me suffira d'avoir conversé avec vous par le ministère de mon ami. Je suis ravi des bontés que madame du Châtelet témoigne à Césarion. Ce serait un titre pour estimer encore davantage cette dame, si c'était une chose possible.
La sagesse de Salomon eût été bien récompensée, si la reine de Saba eût ressemblé à celle de Cirey. Pour moi, qui n'ai l'honneur d'être ni sage, ni Salomon, je me trouve toujours fort honoré de l'amitié d'une personne aussi accomplie que madame la marquise. J'ai lieu de croire que sa vue me ferait naître des idées un peu différentes de ce que le vulgaire nomme sagesse. Je me flatte que, comme vous avez la satisfaction de connaître de plus près cette divinité, vous vous sentirez quelque indulgence pour mes faiblesses, si faiblesse y a de trop admirer les chefs-d'œuvre de la nature.
D'un raisonnement de philosophie, je me vois insensiblement engagé dans un avorton de déclaration d'amour : et, tandis que ma mé-