Et je n'ai point quitté votre adorable cour
Pour soupirer en sot aux genoux d'une femme.
Mais, Sire, cette femme a abandonné pour moi toutes les choses pour lesquelles les autres femmes abandonnent leurs amis; il n'y a aucune sorte d'obligation que je ne lui aie. Les coiffes et la jupe qu'elle porte ne rendent pas les devoirs de la reconnaissance moins sacrés.
L'amour est souvent ridicule;
Mais l'amitié pure a ses droits,
Plus grands que les ordres des rois.
Voilà ma peine et mon scrupule.
Ma petite fortune mêlée avec la sienne n'apporte aucun obstacle à l'envie extrême que j'ai de passer mes jours auprès de V. M. Je vous jure, Sire, que je ne balancerai pas un moment à sacrifier ces petits intérêts au grand intérêt d'un être pensant, de vivre à vos pieds, et de vous entendre.
Hélas! que Gresset est heureux!
Mais, grand roi, charmante coquette,
Ne m'abandonnez pas pour un autre poëte;
Donnez vos faveurs à tous deux.
J'ai travaillé Mahomet sur le vaisseau, j'ai fait l'Épître dédicatoire.a V. M. permet-elle que je la lui envoie?
Je suis avec le plus tendre regret et le plus profond respect, Sire, de Votre Humanité le sujet, l'admirateur, le serviteur, l'adorateur.
a Cette pièce se trouve dans les Œuvres de Voltaire, édit. Beuchot, t. LIV, p. 256-263. Nous l'avons omise, comme quelques dédicaces d'Algarotti adressées à Frédéric (t. XVIII, p. III). D'ailleurs, Voltaire dédia, depuis, son Mahomet au pape Benoît XIV, au lieu de le dédier à Frédéric, comme il avait d'abord eu l'intention de le faire. Voyez, ci-dessous, p. 78, sa lettre à Frédéric, du 5 mai 1741.