<97>ment le caractère dominant de la plupart des hommes qui sont à la tête des nations, et qui en devraient être l'exemple. C'est une chose bien humiliante que l'étude du cœur humain dans de pareils sujets; elle me fait regretter mille fois ma chère retraite, les arts, mes amis et mon indépendance.
Adieu, cher Voltaire; peut-être retrouverai-je un jour tout ce qui est perdu pour moi à présent. Je suis avec tous les sentiments que vous pouvez imaginer, etc.
176. AU MÊME.
Selowitz, 23 mars 1742.
Mon cher Voltaire, je crains de vous écrire, car je n'ai d'autres nouvelles à vous mander que d'une espèce dont vous ne vous souciez guère, ou que vous abhorrez.
Si je vous disais, par exemple, que des peuples de deux contrées de l'Allemagne sont sortis du fond de leurs habitations pour se couper la gorge avec d'autres peuples dont ils ignoraient jusqu'au nom même, et qu'ils ont été chercher dans un pays fort éloigné, pourquoi? parce que leur maître a fait un contrat avec un autre prince, et qu'ils voulaient, joints ensemble, en égorger un troisième; vous me répondriez que ces gens sont fous, sots et furieux, de se prêter ainsi aux caprices et à la barbarie de leurs maîtres. Si je vous disais que nous nous préparons avec grand soin à détruire quelques murailles élevées à grands frais, que nous faisons la moisson où nous n'avons point semé, et les maîtres où personne n'est assez fort pour