<437> où vous êtes encore dans toute votre force. Je soupçonne qu'il y a quelque opilation dans les viscères du bas-ventre, et j'opine pour les eaux minérales et apéritives. L'estomac est dans le cas des philosophes; on l'accuse souvent de la faute des autres. Il faut que vous fassiez examiner vos urines, et que vous vous tâtiez sous les côtes, pour vous assurer que le foie est en bon état; il faut que les médecins observent si le fiel et la bile font leur devoir en concourant à la digestion; il faut que, sur les symptômes, ils s'assurent si votre mésentère est en bon état, ou si le sang est trop épaissi; car tous ces détails sont nécessaires pour fonder la méthode selon laquelle ils doivent vous traiter. Toutefois prenez de l'exercice, et ne vous en désaccoutumez pas, ou votre mal ira en empirant. Songez qu'il n'y a que vous seul qui souteniez en ce moment la gloire de votre patrie; et comme vous aimez cette ingrate, conservez-vous au moins pour elle.
Croiriez-vous bien que j'ai reçu une lettre de Voltaire? Je lui ai répondua fort obligeamment, mais en même temps j'ai entremêlé quelque chose de l'infâme, ce qui l'empêchera d'abuser de ma lettre.b Il crie contre son Dictionnaire philosophique, qu'on imprime en Hollande; mais nous savons à quoi nous en tenir. A propos, on dit que vous avez un monstre dans le Gévaudan; vous verrez que c'est le marquis avec sa capote, qu'on aura pris pour un monstre. On dit qu'il dévore des enfants, et qu'il est fort leste à sauter de branche en branche; cela ne lui ressemble pas; si le monstre dormait, ce ne pourrait être que lui.c
a Le 1er janvier 1765. Voyez t. XXIII, p. 103.
b La fin de cette phrase, à partir de « mais en même temps, » est omise dans les Œuvres posthumes, t. XI, p. 8; nous la tirons de la traduction allemande de cette correspondance, pour laquelle on s'est servi des manuscrits originaux. Voyez Friedrichs des Zweiten hinterlassene Werke. Nouvelle édition. Berlin, 1789, t. I, p. xxxI (b).
c Le Roi parle du marquis d'Argens, alors en France. Voyez t. XIX, p. 445. La bête du Gévaudan fut tuée le 20 septembre 1765, et reconnue pour un loup.