<610>rents peuples de la Germanie. La littérature, qui a déjà tant d'obligations à V. M., lui en aurait une nouvelle, si elle voulait bien donner les ordres pour vérifier ce fait, et pour s'assurer au moins que ce précieux manuscrit n'existe pas, comme il n'y a que trop lieu de le croire.

En priant V. M. de vouloir bien faire éclaircir cette anecdote, je prendrai la liberté de lui en apprendre une autre. Il est mort au mois de janvier dernier, dans un village nommé Vitry, tout près de Paris, une femme qui y vivait assez obscurément, et même assez pauvrement, et qu'on assure avoir été la veuve du czarowitz Alexis,a que son père le czar Pierre Ier fit mourir. Si la chose était vraie, cette femme serait la belle-sœur du feu empereur Charles VI, dont la femme était Wolfenbüttel, comme celle du czarowitz. Cette dernière, à ce qu'on répandit dans le temps, était morte d'un coup de pied dans le ventre que son mari lui avait donné dans une grossesse; mais on prétend qu'on avait enterré une bûche à sa place, qu'elle s'était enfuie de Russie, qu'elle a été à la Louisiane, et de là à l'Ile de France, où elle avait épousé un officier nommé Maldack,b dont elle portait le nom à sa mort. Plusieurs circonstances réunies, et dont la réunion forme d'assez fortes preuves, paraissent prouver que cette femme était réellement la veuve du prince Alexis; il paraît certain qu'elle recevait une pension de la cour de Brunswic, et peut-être V. M. pourrait-elle en savoir davantage par cette voie.

Je suis avec le plus profond respect, etc.


a Charlotte-Christine-Sophie, fille de Louis-Rodolphe, duc de Brunswic-Blankenbourg, et femme du czarowitz Alexis, était morte le 1er novembre 1715.

b Ou plutôt d'Auban. Voyez la Correspondance littéraire, philosophique et critique, adressée à un souverain d'Allemagne, par le baron de Grimm et par Diderot, seconde édition, Paris, 1812, t. II, p. 1-9, et p. 77-79.