<673>nion qu'elle en a prise, et que j'étais bien sûr qu'elle en aurait. Je désire avec impatience de savoir le jugement que V. M. aura porté de sa tragédie, et j'avoue que je serais bien trompé, si elle n'entend cet ouvrage avec plaisir, et avec estime pour l'auteur. Mais ce que j'attends, Sire, avec plus d'impatience encore, ce sont les nouvelles qu'il me dira de la santé de V. M., qui me paraît s'affermir par l'augmentation de ses succès et de sa gloire. Je ne doute point qu'elle ne mette bientôt le comble à cette gloire immortelle, en donnant à la Russie, à la Pologne, aux Turcs mêmes, tout Turcs qu'ils sont, la paix dont ils ont tous si grand besoin, et qu'il n'a pas tenu à elle de leur donner plus tôt; et que V. M. ne joigne au titre de héros, qu'elle a mérité depuis si longtemps, celui de pacificateur, qu'elle obtiendra encore, malgré les efforts que l'envie pourra faire pour l'empêcher.
La gaîté de la dernière lettre que V. M. m'a fait l'honneur de m'écrire est pour moi un garant précieux de la santé dont elle jouit, et qui m'est si chère, ainsi qu'à tant d'autres. Quand je me sens tenté de bouder contre la nature de ce qu'elle m'a donné un si triste et si frêle individu, je lui pardonne en pensant qu'elle conserve V. M., et je me dis tout bas à moi-même : Tais-toi, et ne te plains pas, car le grand homme se porte bien. Puissiez-vous, Sire, faire encore longtemps des vers tels que ceux que vous avez eu la bonté de m'envoyer, dussent les curieux impertinents qui ont mis V. M. de mauvaise humeur les trouver assez bons pour vouloir en prendre des copies! Quoique ces curieux impertinents ressemblent à M. van Haaren,a et qu'ils puissent se vanter comme lui de n'avoir point d'imagination, je ne les en crois pourtant pas assez dépourvus pour ne pas sentir celle qui a dicté vos vers. V. M. ne sera jamais dans le cas de donner à ses vers le même éloge que ce poëte très-hollandais donnait aux siens, ni de dire d'aucun de ses ouvrages ce qu'un certain Hardion, plat instituteur de princesses très-respectables, disait, en
a Voyez ci-dessus, p. 624.