<382> la modestie avec laquelle on entend parler de pareilles visites ne permet pas qu'on adopte mon enseigne, ni qu'on accorde à son colonel invalide la place de garçon qu'il brigue.
Je commence à désespérer, Sire, de jamais bien rectifier les notions de V. M. sur mes dignités et titres hyperboréens, d'autant que je n'ai à montrer aucune patente visée par le prince Potemkin; je tiens toutes mes prérogatives de la pure et spéciale grâce de mon auguste bienfaitrice. Comme mon titre de souffre-douleur broche sur tous les autres, j'ai osé me flatter de pouvoir y associer celui de plastron de V. M.; je croyais souffre-douleur et plastron cousins germains; mais la définition de Végèce, qui, s'il eût vécu de notre temps, eût cherché ses définitions sur les rives de la Sprée et de la Havel, me déroute entièrement. Je n'ai éprouvé de la part de V. M. que des traits de bonté et de bienfaisance, et je n'ai contre ces traits qu'une arme défensive, ma reconnaissance et mon attachement malheureusement inutile; je vois bien qu'il faut que je me déplastronne.
Il y a aujourd'hui, Sire, grand vacarme dans le taudis du souffre-douleur dépouillé de sa dignité de plastron. On y célèbre un des jours les plus solennels de l'année, le 24 janvier. Puisse l'objet auguste de mes vœux en éprouver l'efficacité jusqu'au terme le plus reculé de la vie humaine! On dit que jamais sa santé n'a été plus parfaite, ni mieux affermie; cette circonstance rend la solennité du jour complète dans le taudis.
Je suis avec le plus profond respect, etc.