<410> sa patrie. Son curé n'a pas osé, à la vérité, lui refuser la sépulture. Il savait que j'aurais le courage d'invoquer contre cet acte de fanatisme l'autorité des lois, et que cette réclamation serait écoutée; le prêtre s'est donc borné à refuser la sépulture dans l'église, distinction absurde en elle-même, mais encore en usage parmi nous, qu'on ne refuse point à ceux qui la payent, et à laquelle les amis de M. d'Alembert attachaient quelque prix, parce qu'elle leur donnait le droit de lui ériger un monument. Le curé a joint à ce refus celui de tous les petits honneurs qu'il pouvait ne pas accorder sans se compromettre, et M, d'Alembert a été porté sans appareil, au milieu d'un peuple étonné que ses prêtres traitassent avec tant d'indécence un homme dont ces mêmes prêtres n'avaient jamais en vain sollicité la bienfaisance dans les besoins extraordinaires des pauvres.
M, d'Alembert a laissé un volume d'ouvrages de mathématiques, et plusieurs volumes de philosophie et de littérature, prêts à être imprimés. Je me propose de donner une édition complète de ses œuvres philosophiques et littéraires, et j'ose demander à V. M. la permission de la faire paraître sous ses auspices. C'est au nom seul de M. d'Alembert que je sollicite cette grâce; le mien est trop obscur et trop peu connu de V. M.
M. d'Alembert m'a remis, la surveille de sa mort, sa correspondance avec V. M., et tous ses papiers. Il a conservé pendant cette opération, qui a été longue et bien douloureuse pour l'amitié, une fermeté, une présence d'esprit, un calme dont il était impossible de n'être pas attendri, en admirant son courage. Les lettres de V. M. ont seules paru dans ce cruel instant lui causer des regrets, et réveiller sa sensibilité. Son intention était depuis longtemps que ce dépôt fût confié après sa mort à M. Watelet, de l'Académie française, son ancien ami. Le paquet, cacheté en présence de M. d'Alembert, a été remis à M. Watelet dans le même état.
Il a laissé d'autres marques précieuses des bontés de V. M., et n'a