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175. A D'ALEMBERT.

Le 22 octobre 1776.

Vous voilà accablé de versa dont je crois que vous vous seriez passé. J'ai cru cependant que quelques réflexions assez graves pourraient coin cuirb à la douce mélancolie où je vous crois plongé. Ces vers ne demandent qu'à être déchirés avant ou après leur lecture; c'est tout ce qu'ils méritent. Pour moi, je vois avec impatience la belle automne dont nous jouissons; je demande quand arrivera l'hiver, pour demander ensuite quand viendra le printemps, enfin cet été qui me procurera le plaisir de vous revoir, et je dis :

Volez, volez, heures trop lentes
Pour mes impatients désirs.b

Lorsque quelqu'un vient de France, par exemple M. de Rulhière,c je ne m'informe pas de ce que font vos providences dans leur troisième ciel de Versailles, je ne demande point si vos Mars subalternes à six sols par jour sont encachottés ou rossés à coups de plat d'épée, si vos ports regorgent de vaisseaux, si les manches et les poches des hommes haussent ou baissent, si l'on se frise en bec de corbin ou en ruisseau; enfin je passe cent choses de cette importance pour demander : Que fait le duc de Nivernois? Comment se porte Anaxagoras?


a Épître à d'Alembert. Voyez t. XIV, p. 112-115, et, t. XXIII, p. 433, la lettre de Frédéric à Voltaire, du 22 octobre 1776.

b Gresset dit dans son Épître Ire, intitulée La Chartreuse :
     

Dans ces solitudes riantes
Quand me verrai-je de retour?
Courez, volez, heures trop lentes
Qui retardez cet heureux jour.

Voyez notre t. XII, p. 162.

c Claude-Carloman de Rulhière, auteur de l'Histoire de l'anarchie de Pologne et du démembrement de cette république, Paris, 1807, quatre volumes in-8.