<108> ouï faire tant de faux jugements sur les actions des princes, la plupart du temps manque de connaissance! Les circonstances rendent un lait injuste ou innocent; mais lorsqu'on ignore parfaitement ces circonstances, quel arrêt peut-on prononcer? Je ne demande ni louange, ni blâme; je ne veux qu'avoir sujet moi-même d'être satisfait de ma conduite et de n'avoir nul reproche à me faire. Du reste, on sait assez que l'on ne peut contenter tout le monde, qu'on a des envieux et des ennemis, et que la réputation est quelque chose de si frivole, qu'on voit le public changer de sentiment avec légèreté d'un jour à l'autre, blâmer le soir ce qu'il a applaudi le matin, faire des jugements si injustes, que je m'étonne, après cela, de voir des gens briguer des suffrages aussi frivoles et aussi méprisables.
Je vous demande pardon de la forte dose de morale que j'ai mise dans ma lettre; quelque vapeur de Sénèque m'est montée à la tête; mais je vous promets d'être plus gai la première fois que je vous écrirai, vous assurant de la tendresse sincère avec laquelle je suis, etc.
12. AU MÊME.
(Potsdam) 22 octobre 1746.
Mon très-cher frère,
Je viens de recevoir aujourd'hui quelque chose de bien agréable, qui est l'acte de garantie général de l'Angleterre sur la Silésie et toutes mes autres provinces.a Cette garantie, jointe à la bataille de Liége,b me rend de la meilleure humeur du monde. J'aurai le plaisir de vous
a Cet acte est du 19 septembre 1746.
b La bataille de Rocoux. Voyez t. IV, p. 13.