<260> prévention que vous avez contre lui. Il raille fort piquamment sur le sujet de ce dernier, et je vous avoue, mon cher frère, que je n'ai pu m'empêcher de rire en lisant l'article, car il est tourné si comiquement, qu'on ne saurait garder son sérieux. Je ne manquerai pas de vous avertir de tout ce que j'apprendrai de lui. Ma faiblesse m'oblige de finir, mais jamais d'être avec tout le respect et la tendresse imaginable, mon très-cher frère, etc.

260. A LA MARGRAVE DE BAIREUTH.

Ce 29 (avril 1753).



Ma très-chère sœur,

Votre lettre me tire de la plus cruelle incertitude où mortel puisse se trouver. J'appréhendais pour votre précieuse santé. J'avais dépêché Cothenius pour Baireuth, et je ne recevais point de nouvelles. Grâces au ciel, vous m'en donnez vous-même, et de bonnes. Si ma malheureuse machine n'était pas enchaînée ici sur ma galère, j'aurais volé à vous pour me tirer d'inquiétude; mais je suis moins maître de mes actions que le plus petit particulier, et il faut que je rame, puisque c'est mon destin de ramer. J'ai cependant eu la consolation de revoir ma sœur d'Ansbach. Jugez du plaisir que j'ai ressenti en embrassant une amie de mon enfance, une sœur que j'aime tendrement, et que je n'ai vue de neuf ans.a Il n'y a eu que le congé de triste dans tout cela, et ce sont, je crois, des moments qu'il faut éviter autant qu'il est possible. Elle sera aujourd'hui à Brunswic, et je crois que vers le 7 ou le 8 du mois qui vient, elle sera à Baireuth.


a Frédéric avait été à Ansbach le 17 septembre 1743. Voyez ci-dessus, p. 134 et suivantes.