<301> d'un beau tableau du Guide. J'espère bien, ma chère sœur, que vous ne montrerez pas ma lettre aux personnes qui vous environnent à présent; ce ne serait pas faire ma cour à messieurs les ultramontains, qui, n'ayant rien de propre des monuments de grandeur qui leur restent, sont comme les gueux, qui, à ce que dit le proverbe, sont plus vains que les riches. Je vous fais mille excuses de mon impertinent bavardage; peut-être suis-je dans le cas du renard qui trouvait les raisins aigres parce qu'il ne pouvait pas en manger, ou de ce forçat qui, s'étant fait une habitude de ramer sur sa galère, regardait avec dédain les hommes qui jouissaient de leur liberté. Je vous prie, n'oubliez pas les tudesques habitants des bords de la mer Baltique, et que le beau climat de l'Italie ne vous donne aucune aversion contre les frimas de votre climat natal. Je suis avec la plus parfaite tendresse, ma très-chère sœur, etc.
296. A LA MÊME.
Le 4 juin 1755.
Ma très-chère sœur,
J'ai reçu votre lettre datée de Florence et de Rome peu de moments avant de partir pour le pays de Clèves. Je suis charmé, ma chère sœur, que le voyage d'Italie vous fasse plaisir. II faudra bien du temps avant que nos gros paysans allemands fassent des vers comme les Florentins, avant que nos peintres égalent les Paul Véronèse et les Titien, avant que nous ayons d'assez superbes palais pour faire avec le temps de belles ruines; et je crois que tout cela n'arrivera que lorsque notre soleil aura la force qu'il fait sentir au trente-sixième